17 mars 2016 - 00:00
Exploitation sexuelle : rare, mais pas inexistante à Saint-Hyacinthe
Par: Jennifer Blanchette | Initiative de journalisme local | Le Courrier
Exploitation sexuelle : rare, mais pas inexistante à Saint-Hyacinthe

Exploitation sexuelle : rare, mais pas inexistante à Saint-Hyacinthe

Exploitation sexuelle : rare, mais pas inexistante à Saint-Hyacinthe

Exploitation sexuelle : rare, mais pas inexistante à Saint-Hyacinthe

Des jeunes filles ayant fugué du Centre jeunesse de Saint-Hyacinthe ont été recrutées par les gangs criminalisés ou les proxénètes, a confirmé la SQ. Photo François Larivière | Le Courrier ©

Des jeunes filles ayant fugué du Centre jeunesse de Saint-Hyacinthe ont été recrutées par les gangs criminalisés ou les proxénètes, a confirmé la SQ. Photo François Larivière | Le Courrier ©

Quelques jeunes ayant visité l’auberge du coeur Le Baluchon présentaient un passé d’exploitation sexuelle, a fait savoir la directrice Suzanne Demers. Photo Robert Gosselin | Le Courrier ©

Quelques jeunes ayant visité l’auberge du coeur Le Baluchon présentaient un passé d’exploitation sexuelle, a fait savoir la directrice Suzanne Demers. Photo Robert Gosselin | Le Courrier ©

Le recrutement de jeunes filles en fugue des Centres jeunesse dépasse les territoires de Laval ou de Montréal. Les proxénètes sévissent également à Saint-Hyacinthe, a appris LE COURRIER.

« Nous avons été mis au courant que des jeunes filles qui avaient fugué du Centre jeunesse de Saint-Hyacinthe avaient été recrutées par des gangs de rue ou ­criminalisés », a indiqué la sergente Mélanie Dumaresq, porte-parole de la Sûreté du Québec (SQ), sans toutefois pouvoir avancer de chiffres.

Ces groupes ne seraient pas établis dans la région. Ils visiteraient plutôt de façon sporadique la ville ainsi que d’autres territoires situés en région, a-t-elle précisé.

Un constat que corrobore Suzanne ­Demers, directrice de l’auberge du coeur Le Baluchon, une maison maskoutaine d’hébergement temporaire pour adolescents dont les services offerts se ­situent principalement en aval de ceux du Centre jeunesse de Saint-Hyacinthe.

« C’est rare les jeunes qui nous arrivent avec un passé trouble d’exploitation sexuelle, mais il y en a ici. Ce n’est pas juste à Laval », a-t-elle affirmé, en ­référence aux nombreuses fugues recensées dans ce Centre jeunesse ­dernièrement.

Aucun recrutement n’est fait au ­Baluchon, a assuré Mme Demers, « mais nous savons que ça se fait à Saint-Hyacinthe. Nous nous sommes ­laissé dire qu’il y avait du recrutement au Centre jeunesse, mais aussi beaucoup au centre commercial. Et pas seulement auprès de jeunes filles, mais de jeunes garçons aussi ».

Dans bien des cas, a-t-elle poursuivi, les exploiteurs recruteront les adolescentes dans une ville pour ensuite l’éloigner et l’isoler davantage.

D’après Suzanne Demers, l’exploitation sexuelle n’est pas un sujet abondamment discuté par les partenaires jeunesse de la région. « Pour nous, c’est une problématique parmi tant d’autres. Mais vous savez, le fait de barrer les portes ou de nommer un vérificateur en Centre ­jeunesse ne changera pas grand-chose. Le problème, c’est que les intervenants ont déjà subi des millions en coupures. Par contre, le but n’est pas d’accuser les Centres jeunesse. Il faut plutôt que tout le monde s’imbrique globalement. »

Une source a également indiqué au COURRIER que la présence du crime organisé à Saint-Hyacinthe limitait le recrutement de jeunes filles en vue de l’exploitation sexuelle par les gangs de rue. La SQ n’a pas souhaité ­commenter l’information afin de ne pas nuire aux enquêtes en cours en lien avec ce milieu.

Hausse des fugues

Selon les données obtenues auprès du Centre intégré de santé et de services ­sociaux de la Montérégie-Est (CISSSME), il y a eu 1 480 fugues réparties dans les quatre installations (Chambly, ­Valleyfield, Longueuil et Saint-Hyacinthe) du Centre jeunesse de la ­Montérégie en 2014-2015.

Le CISSSME a toutefois refusé de dévoiler les statistiques par établissement pour éviter d’attirer davantage l’attention des recruteurs dans cette région.

Pour l’ensemble de la Montérégie, les fugues de courte durée ont connu une augmentation de 14 %, tandis que celles de plus de 72 heures sont passées de 10 à 7 %. Plus de 80 % des fugues ont duré moins de 24 h.

« Pour le moment, nous n’avons pas d’évidence qu’il y ait d’infiltrations des gangs de rue/proxénètes à l’intérieur du Centre jeunesse. Mais, il est possible qu’à l’extérieur, via les médias sociaux, il y ait du recrutement qui se fasse. C’est un ­phénomène connu et nous demeurons vigilants », a fait savoir le CISSSME.

Au sein du Baluchon, le concept de ­fugues n’existe pas puisque les jeunes y sont admis sur une base volontaire en fonction de leur objectif de vie.

La prévention avant tout

Pour éviter l’exploitation sexuelle auprès des adolescents, tout se joue dans la ­prévention, croit Suzanne Demers.

« Il y a des jeunes filles qui arrivent ici avec un historique assez lourd. Nous ­essayons le plus possible de développer leur filet de sécurité sociale personnel. Nous leur faisons connaître les ­ressources du milieu et nous développons un lien de confiance avec elles. Plus nous travaillons l’autonomie de ces jeunes filles tôt, plus nous ­pourrons les protéger des mauvaises ­influences extérieures. »

Ainsi, diverses activités de formation et ateliers en lien avec la fugue et l’exploitation sexuelle sont offerts aux jeunes résidents du Baluchon.

« Il faut dénoncer les coupures et ­l’austérité pour éviter aux jeunes de ­tomber dans la grosse trappe de la ­pauvreté. Avec le désengagement de l’État, on ne sait plus trop où on s’en va », dénonce Mme Demers.

Le Baluchon reçoit 395 000 $ en subvention gouvernementale chaque ­année, mais d’après sa directrice, le double serait nécessaire afin de faire fonctionner cette ressource pouvant accueillir jusqu’à 24 jeunes par jour.

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