29 novembre 2018 - 00:00
Les imparfaits
Par: Le Courrier

Le 7 novembre, quelque 500 personnalités, dont le metteur en scène Dominic Champagne, ont lancé Le pacte. Il s’agit d’une promesse par laquelle chacun s’engage, en la signant, à faire des efforts pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre. Le signataire précise toutefois ce qui suit : « En contrepartie de mes efforts individuels, [...] je demande aux gouvernements de s’engager » à faire des gestes en faveur de l’environnement.


De plus, le 10 novembre, quelque 50 000 personnes ont manifesté dans les rues de Montréal, alors que d’autres marchaient dans plusieurs villes de la province. Voilà que l’on fait quelque chose de positif pour réduire les impacts climatiques!

Signer? Ne pas signer? La controverse s’est installée dans les médias et les réseaux sociaux! Ceux qui s’opposent au pacte affirment que nous avons besoin de pétrole; de plus, ils font la chaude gorge au sujet de la prétendue hypocrisie des signataires qui ne sont pas parfaits sur le plan environnemental. C’est leur choix! Après tout, personne n’est parfait; nous avons tous nos contradictions! L’être humain « imparfait » est au cœur de la théologie du péché originel tel que nous l’enseigne la morale judéo-chrétienne!

La force du pacte, c’est d’agir malgré nos faiblesses et nos contradictions. Même si je vis dans un monde où je produis plus de carbone qu’il ne serait souhaitable, je m’engage à faire quelque chose; mon action « pour » la réduction de mon empreinte carbone sera différente de celle de mon voisin. Et comme la somme des efforts individuels des quelque 200 000 signataires sera insuffisante, le pacte « exercera une salutaire pression politique sur les élus ».

Oui, moi aussi je suis imparfait; et les hypocrites, partisans des excuses pour ne rien faire, peuvent me reprocher bien des choses, dont ma voiture. Je demeure loin du village; pour aller chercher un litre de lait chez le dépanneur le plus près, il me faut faire un aller-retour de 10 km. J’ai donc intérêt à prévoir mes besoins pour réduire mes déplacements.

Comme il n’y a pas de transport en commun, je dois avoir une voiture. Mais je refuse de rouler avec un gros pick-up que la publicité nous vante tant; je roule avec une Prius Prime branchable. Réduire ma consommation de pétrole est ma première étape. Quant à la pléthore de produits que l’on me propose dans le publi-sac hebdomadaire, le mantra « en as-tu vraiment besoin? » de Pierre-Yves McSween me semble une autre façon de réduire mon empreinte carbone.

Dans Reporterre, le commentaire d’Isabelle Attard, ex-députée écologiste française, me semble pertinent : « Régulièrement, à la lecture d’articles traitant d’écologie, de transition énergétique ou du réchauffement climatique, je me pose les mêmes questions : s’agit-il d’actes isolés, d’actions et de prises de conscience individuelles ou bien d’actions collectives menées dans l’intérêt général? Comment les deux peuvent-ils s’articuler, interagir, faire boule de neige? »

Signer le pacte malgré nos failles? Il est vrai que quelques personnes signeront de façon désinvolte, comme on prend une résolution du jour de l’an. D’autres seront sincères, même si leur volonté vacillera devant la tentation de la « drogue du pétrole ». Tout comme les « accros » de la morphine, nous savons que notre dépendance maladive aux énergies fossiles et à la consommation abusive des ressources de la planète est en train de nous tuer, mais nous pouvons trouver toutes sortes d’excuses pour continuer notre mode de vie autodestructeur. Le pacte est le début d’une cure de désintoxication; saurons-nous persévérer?

image