4 octobre 2012 - 00:00
Beaujolais : le Nouveau et les vieux
Par: Hélène Dion

La perception du Beaujolais reste encore aujourd’hui très attachée à celle du Beaujolais Nouveau. Ce vin, à peine sorti de cuve après la fermentation, est mis en marché le 3 e jeudi de novembre de chaque année.

Il n’a pas la prétention d’éveiller l’admiration de l’intelligentsia. C’est un vin de fête, de tradition, sans prétention, destiné au plaisir immédiat de son fruit, de sa souplesse et de sa fraîcheur. Il faut l’imaginer dans une soirée entourée de copains, plateaux de charcuteries, rires et chansons.

Mais le Beaujolais, c’est aussi des vins capables de vieillir, à la charpente assumée. Des vieux vins en Beaujolais, c’est possible. J’ai découvert cette région sous un autre angle lors de ma visite au Château de Vaurenard avec le millésime 1995 en appellation Beaujolais Supérieur. Peu de vignerons revendiquent la mention « Supérieur » qui indique un degré de sucre naturel plus élevé et des rendements plus faibles à la vigne. Pour M. de Longevialle, cette mention exprime surtout les longs élevages de ses vins en foudres de chêne, une période qui s’étend sur un minimum de deux ans. Son 2003 a passé six ans dans les foudres… imaginez… nous sommes à des lieux du Beaujolais Nouveau! La signature du domaine se joue sur des évolutions complexes, de la finesse, de la fraîcheur, du fruit croquant et de la mâche! Le 1995 avait de la matière, de la vivacité, du fruit et une complexité aromatique étonnante qui a démenti toutes les idées préconçues que j’avais de ce vin supposément « à boire jeune ». Sur la même lancée, le 1991 avait un bouquet se rapprochant de vieux grenaches avec en bouche, de l’élégance et une finesse comparable à la dentelle. Le 2009, que nous avons dégusté directement de la foudre, promet un bel avenir, de la complexité, avec une matière riche en bouche et des arômes en puissance. Ghislain de Longevialle souhaite le mettre en bouteille en 2015 pour le vendre l’année suivante. Soyons patients.

Le Beaujolais : quelques indications

Entre Mâcon et Lyon, 55 kilomètres de vignobles en coteaux donnent naissance aux vins du Beaujolais. Sur les derniers contreforts du Massif central, les vignes donnent lieu à un paysage vertigineux.

La particularité du vignoble est son cépage, le Gamay noir à jus blanc, qui produit une variété de styles insoupçonnée. Sur les sols granitiques, on retrouve la zone des crus au nord et sur les sols à dominance argilo-calcaire, c’est la partie du Beaujolais et Beaujolais Villages au sud et à l’est. Douze appellations couvrent le territoire : Beaujolais, Beaujolais Villages, et les crus Saint-Amour, Juliénas, Chénas, Moulin à Vent, Fleurie, Chiroubles, Morgon, Régnié, Côte de Brouilly et Brouilly. Le vin rouge domine, avec une production confidentielle de rosé et de blanc (issu du chardonnay).

Millésime difficile

Le climat continental, et plus méditerranéen au retour des beaux jours, est régulé par la Saône parfois jusqu’au printemps.

Le millésime 2012 aura donné du fil à retordre aux vignerons. Des gelées d’hiver, de la grêle et des épisodes de mildiou et d’oïdium ont fait chuter de moitié la production de l’année. En réalité, cela signifie que plusieurs vignerons devront fermer boutique avec une récolte qui ne leur permettra pas de survivre. Par contre, la récolte 2012, si réduite soit-elle, sera de qualité.

En SAQ :

– Saint-Amour 2011 – Vieilles vignes – Domaine Lassagne – Code SAQ : 10367906 – Prix : 20,20 $

La dégustation du millésime 2007 de cette cuvée a révélé un bouquet de kirsch, de torréfaction, de sous-bois avec une bouche fine et des tanins soyeux. – Chiroubles 2010 – Domaine des Marrans (attendu sous peu en SAQ) Dégusté le millésime 2011 avec des épices, de la minéralité, une bouche charnue et une finale épicée.

– Beaujolais 2011 « Les Griottes » – Pierre-Marie Chermette – Domaine du Vissoux – Code SAQ : 11259940 – Prix : 16,75 $

La cuvée souplesse du domaine, avec du fruit au nez, dominé par la cerise. La bouche est vive et souple avec un fruit tonique qui plaît.

– Moulin à Vent 2010 – « Les trois roches » – Pierre-Marie Chermette – Domaine du Vissoux – Code SAQ : 11154427 – Prix : 24,55 $

Vinifié par parcelles correspondant à trois terroirs distincts, cette cuvée plaît par sa texture au grain défini et son caractère épicé. (millésime dégusté 2011)

– Morgon 2011 – Jean-Paul Brun – Domaine des Terres Dorées – Code SAQ : 11589746 – Prix : 19,85 $

Le nez, finement anisé avec du fruit, invite à une bouche épicée, aux tanins fins.

– Moulin à Vent 2010 – Jean-Paul Brun – Domaine des Terres Dorées – Code SAQ : 10837331 – Prix : 22,05 $ (millésime dégusté 2011)

Au nez, touche de minéralité, de fruits, de kirsch, d’épices. La bouche est droite et élégante avec une finale épicée.

Coup de coeur : sentir « la bonne tonne »

Le domaine De la Bonne Tonne est en culture bio et en conversion biodynamique sur le lieu-dit de la Bonne Tonne. Ses vins magnifiques sont disponibles en importation privée seulement. La cuvée « Les Charmes » en Morgon 2010, en bouteille de 500 ml, livre des arômes puissants, complexes, avec des notes de graphite, d’épices, de fruits, un brin ferreux, au grain défini et fin. Le Morgon Côte du Py 2010 est aromatique, minéral, à la touche de poivre rose. En bouche, on pourrait croire que la vigne a pompé toute la matière possible de son sol! Et puis le Morgon 2009 issu de vignes vieilles de 110 ans… chargé de soleil et de matière, est une expérience en soit. Extraordinaire.

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