12 novembre 2020 - 14:42
DoorDash aux portes de Saint-Hyacinthe
Par: Olivier Dénommée
Plusieurs restaurateurs locaux offrent dorénavant la livraison depuis que DoorDash a étendu son service à Saint-Hyacinthe. Photo François Larivière | Le Courrier ©

Plusieurs restaurateurs locaux offrent dorénavant la livraison depuis que DoorDash a étendu son service à Saint-Hyacinthe. Photo François Larivière | Le Courrier ©

Le 21 octobre, le service de livraison DoorDash a fait une entrée remarquée à Saint-Hyacinthe, misant sur une publicité très agressive et sur son partenariat avec les restaurants McDonald’s, permettant pour la première fois d’offrir la « McLivraison » sur le territoire maskoutain. LE COURRIER s’est intéressé à ce nouveau service qui dessert, au moment d’écrire ces lignes, près d’une trentaine de restaurants sur le territoire.

DoorDash, tout comme d’autres services similaires tels qu’Uber Eats ou SkipThe Dishes, est présent depuis quelques années dans les grandes villes nord-américaines et offre un service de livraison du restaurateur au particulier en utilisant une application. L’entreprise californienne fondée en 2013 semble profiter de la pandémie pour accélérer son expansion dans des villes québécoises de taille moyenne comme Saint-Hyacinthe, Drummondville, Granby ou encore le secteur de Belœil, Mont-Saint-Hilaire et Saint-Bruno-de-Montarville.

Le fonctionnement de l’application DoorDash se veut relativement simple, mais n’est pas nécessairement intuitif au premier abord : les usagers sont invités à entrer leur adresse et leur heure désirée de commande, puis à choisir parmi la liste de restaurants partenaires. Tous les restaurants ne sont pas nécessairement autant mis en valeur dans la liste, et certains sont affichés comme fermés même en pleine heure de pointe.

Une fois que le restaurant est sélectionné, il est possible de choisir les produits désirés et de personnaliser le produit, ce qui est notamment plus long dans le cas de la plupart des chaînes de restauration rapide comme McDonald’s, A&W ou Subway, par exemple. Certaines fautes de français (par exemple, on nous propose d’« acceptir la recommandation » si un produit commandé n’est plus disponible) peuvent aussi ajouter à la confusion de l’application ou du site web la première fois qu’on l’utilise.

Certains utilisateurs peuvent aussi avoir de la difficulté à entrer leur mode de paiement voulu ou à donner des instructions au chauffeur, ce qui peut causer quelques frustrations. Il faut aussi noter que DoorDash ne livre pas partout dans la MRC, se concentrant sur Saint-Hyacinthe et les municipalités limitrophes.

Des frais importants

Sans surprise, le service est loin d’être gratuit. Les commerçants doivent verser une commission importante (avoisinant les 30 %) à DoorDash, ce qui force plusieurs restaurations à ajuster leurs prix à la hausse, mais en plus, les clients doivent bien souvent payer des frais de service, des frais de livraison et du pourboire au livreur. LE COURRIER a réalisé deux tests pour comparer les prix payés au comptoir et ceux payés pour recevoir sa commande par DoorDash.

La première facture au restaurant affichait un total de 18,37 $, et comme le service est nouveau à Saint-Hyacinthe, DoorDash a retiré les frais de livraison (qui étaient estimés à 3,99 $). Aucuns frais de service n’étaient facturés. Le journaliste a tout de même laissé un pourboire de 3 $ (le montant suggéré était même de 4 $), ce qui a monté la facture à un total de 21,37 $. Dans ce premier cas, seul le pourboire marque la hausse (16 %) du prix de la commande, mais si les frais de livraison avaient été facturés normalement, on aurait constaté des coûts 41 % plus élevés, ce qui n’est pas négligeable.

Dans un deuxième test, la facture originale était de 14,25 $ taxes incluses, mais des frais de livraison de 1 $ plus taxes ont été ajoutés (au lieu de 3,99 $, une promotion offerte pour les nouveaux utilisateurs de DoorDash le premier mois) ainsi qu’un pourboire de 3 $, amenant la note à 18,38 $. L’impact sur cette petite commande est d’autant plus grand : 29 % grâce au rabais sur la livraison, 53 % sans. Sans grande surprise, on constate que les frais liés à l’utilisation de l’application font une plus grande différence sur le portefeuille dans le cas de plus petites commandes.

Un reportage de Radio-Canada publié cet hiver soulignait déjà que le fait d’utiliser un service comme DoorDash rehaussait de manière significative les coûts au restaurant. En prenant l’exemple d’un achat de 15 $ avant taxes, « [le] client qui viendrait chercher la commande directement au restaurant pour emporter n’aurait que la taxe à payer, soit 17,94 $. Une économie de près de 7 $ [par rapport au prix total estimé à 24,83 $], ou 28 % ».

À noter que DoorDash propose aux clients de s’abonner au « DashPass », qui permet d’éviter les frais de livraison auprès des restaurateurs participants et de diminuer les frais de service s’il y a lieu moyennant un abonnement de 9,99 $ mensuellement. Selon DoorDash, cet abonnement permet d’économiser en moyenne de 4 à 5 $ par commande, un moyen efficace de fidéliser ceux qui comptent utiliser le service souvent.

Livraison (généralement) efficace

Au moment de passer une commande sur l’application, chaque restaurant indique la durée approximative des délais à prévoir, à cinq minutes près. Par exemple, lorsque le délai moyen de livraison est estimé à 30 minutes, il sera indiqué 25-35 minutes. La distance, la complexité de la commande et l’achalandage ont naturellement un impact sur la durée d’attente estimée. Dans les deux cas où LE COURRIER a utilisé le service, les délais ont été respectés : la première commande, placée en pleine heure de pointe un jeudi, a pris 42 minutes (temps estimé : 34-44 min), alors que la seconde, un lundi sur l’heure du dîner, est arrivée après 31 minutes (temps estimé : 28-38 min).

Il a aussi été possible de suivre en temps réel la trajectoire des livreurs, donnant une estimation assez précise de leur heure d’arrivée une fois qu’ils ont récupéré la commande. Dans les deux tests réalisés par le journaliste, la commande a été respectée et la température était satisfaisante, permettant de dire que l’expérience a été concluante malgré les tarifs plutôt élevés que l’on a notés. On sait toutefois que toutes les livraisons ne se passent pas aussi rondement (voir autre texte).

Quoi qu’il en soit, DoorDash semble bien s’implanter à Saint-Hyacinthe et est arrivé au bon moment alors que plus personne ne s’attendait à ce que les salles à manger des restaurants maskoutains rouvrent à court terme.

Pas le premier à Saint-Hyacinthe

Si l’arrivée de DoorDash a fait beaucoup de bruit il y a quelques semaines, ce n’est pas le premier joueur à offrir la livraison auprès de restaurateurs qui n’étaient pas en mesure d’offrir le service auparavant. J’ai faim, fondé en 2011 à Magog par Olivier Hamann, a élargi son territoire jusqu’à Saint-Hyacinthe le 1er août dernier et fait déjà affaire avec une quinzaine de restaurants locaux.

« Notre service est similaire aux autres, mais notre différence est qu’on a une centrale d’appels et qu’on est en mesure d’offrir un service à la clientèle plus personnalisé que les gros joueurs comme DoorDash ou Uber Eats », a-t-il commenté en entrevue, confirmant que la pandémie actuelle a été bonne pour les affaires et que le service est très en demande. Il se targue aussi de n’avoir que cinq livreurs dévoués au territoire maskoutain, mais que ceux-ci ont été embauchés après une entrevue rigoureuse, une pique lancée en direction de DoorDash et de son processus de recrutement (voir autre texte).

image