16 mai 2013 - 00:00
Effets pervers
Par: Pierre Bornais

La Commission Charbonneau poursuit le déballage des magouilles vécues dans l’administration des fonds publics.

Pour certains, le spectacle est exceptionnel alors que pour d’autres, il est navrant. Exceptionnel parce que, enfin, les malversations orchestrées par des hauts dirigeants de la société québécoise sont révélées au grand jour, confirmant certains soupçons ayant cours depuis longtemps. Navrant parce que le citoyen ordinaire, le « cochon de payeur de taxes », prend la mesure du complot ayant permis à plusieurs personnes de s’enrichir sur leur dos. Il ne faut pas que le débat en reste là. Il est impérieux que ces malfrats soient jugés – rapidement – et qu’ils remboursent les sommes détournées à leur avantage. Ce n’est pas ce que laissent entendre les spécialistes en la matière qui estiment, expériences passées à l’appui, que des années s’écouleront avant qu’un premier magouilleur ne soit reconnu coupable. Et c’est là que la Commission génère plusieurs effets pervers qu’il faut reconnaître dès à présent. Le spectacle public d’un témoin vedette qui y va de déclarations fracassantes, pour ensuite admettre avoir commis quelques petits mensonges par orgueil personnel en est un. Comment se fait-il que les enquêteurs n’étaient pas au courant de faits précis révélés en contre-interrogatoire? Comment séparer le vrai du faux? L’identification publique de certaines personnes, sans qu’elles puissent apporter leur témoignage sans attendre, est une autre approche douteuse. Une fois identifiée, la personne visée pourra clamer son innocence, elle aura été jugée coupable par les téléspectateurs ou à tout le moins, un doute subsistera. Sommes-nous dans une société où toute allégation constitue une condamnation? Qu’adviendra-t-il au lendemain du rapport de la Commission? Qui sera poursuivi et dans quels délais, avec des preuves hors de tout doute raisonnable en cas d’effractions criminelles? La thérapie collective sera longue et pénible…

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