18 mai 2017 - 00:00
Gérer les crises et l’avenir de sa terre en harmonie avec l’environnement
Par: Le Courrier
Le semis direct consiste à semer directement dans les résidus de culture de l’année précédente. Cette approche préconisée par les agriculteurs et agricultrices soucieux de préserver le sol, limite le plus possible les interventions mécaniques. Le soya se pointe à travers les résidus de maïs qui eux serviront à alimenter les microorganismes bénéfiques du sol. Crédit : Nathalie Roy

Le semis direct consiste à semer directement dans les résidus de culture de l’année précédente. Cette approche préconisée par les agriculteurs et agricultrices soucieux de préserver le sol, limite le plus possible les interventions mécaniques. Le soya se pointe à travers les résidus de maïs qui eux serviront à alimenter les microorganismes bénéfiques du sol. Crédit : Nathalie Roy

Le semis direct consiste à semer directement dans les résidus de culture de l’année précédente. Cette approche préconisée par les agriculteurs et agricultrices soucieux de préserver le sol, limite le plus possible les interventions mécaniques. Le soya se pointe à travers les résidus de maïs qui eux serviront à alimenter les microorganismes bénéfiques du sol. Crédit : Nathalie Roy

Le semis direct consiste à semer directement dans les résidus de culture de l’année précédente. Cette approche préconisée par les agriculteurs et agricultrices soucieux de préserver le sol, limite le plus possible les interventions mécaniques. Le soya se pointe à travers les résidus de maïs qui eux serviront à alimenter les microorganismes bénéfiques du sol. Crédit : Nathalie Roy

En collaboration avec la MRC des Maskoutains, Le Courrier présente une série d’entrevues réalisées avec 16 producteurs agricoles qui, à l’été 2016, ont participé au projet Le photographe est dans le pré. Ces producteurs étaient jumelés avec des photographes du Club Photo Saint-Hyacinthe. Par leurs images, ils devaient valoriser le travail de ces agriculteurs, sensibles à la préservation des ressources, qui ont mis en place de bonnes pratiques agroenvironnementales sur leur ferme. Les agriculteurs participants s’impliquent tous bénévolement au sein d’un comité de bassin versant de la MRC. Consultez le site Internet de la MRC pour en savoir plus sur ce projet. 


Cette entrevue avec Jules Beaudoin, de Saint-Hyacinthe, est la cinquième de la série. Il était jumelé à la photographe Nathalie Roy. 

Jusqu’en 1985, la terre chez les Beaudoin était en betterave à sucre à 50 %, une industrie qui, comme on le sait, n’a pas survécu dans notre région. Des céréales et occasionnellement des légumes pour les conserveries étaient les autres cultures pratiquées. Depuis, le maïs-grain et le soja ont remplacé les anciennes cultures. La ferme située à Sainte-Rosalie couvre 60 hectares, soit la partie de la ferme familiale que Jules a conservée après le décès de son père.

En plus d’exploiter sa ferme, il a été comptable pour l’UPA de Saint Hyacinthe jusqu’en 2014. Ces expériences lui ont permis de progresser et de surmonter les difficultés financières, climatiques et de marché qui ont fragilisé bien des fermes depuis ses débuts en agriculture, en 1979.

En qualité de producteur agricole, quelles actions avez-vous mises en place sur vos terres pour améliorer la qualité de l’eau des fossés et ruisseaux?

« L’amélioration de la qualité de l’eau se fait par ricochet à travers mes pratiques culturales. J’ai un ruisseau transversal de 6 arpents de large et dans l’autre sens, sur un kilomètre, j’ai une décharge de ruisseau parallèle au cours d’eau des Douze. Je pratique le semis direct depuis 10 ans. Il y a bien sûr des raisons économiques à cela, mais aussi des raisons écologiques. Une bande riveraine de 1 ou 2 mètres ça aide, mais dans mon cas, c’est tout le champ qui contribue à la qualité de l’eau. Aussi, je fais usage de plantes de couverture en intercalaire. Le sol n’est jamais à nu. Ça garde la terre en santé et une terre en santé, ça se tient. Ceci devrait aider à séquestrer les nitrates et les phosphates non utilisés par la culture en cours et libérer ces nutriments l’année suivante au lieu de les voir disparaître dans les ruisseaux. Auparavant, j’avais deux endroits où de très longues pentes entraînaient sédiments et intrants dans les ruisseaux, ce qui occasionnait des décrochages. J’ai fait construire à mes frais deux déversoirs de 10 mètres de large. Éventuellement, j’aimerais installer une voie d’eau engazonnée dans une autre zone fragile. »

Est-ce que vos actions ont aidé à améliorer la diversité des plantes indigènes, oiseaux, etc. sur vos terres?

« De prime abord, on pourrait penser que non, mais après réflexion et en observant, j’ai pu constater le retour de la perdrix européenne. J’en suis très heureux. »

Jules mentionne aussi la buse à queue rousse et la crécerelle d’Amérique qui sont des espèces plus abondantes. On peut déduire qu’il y a sans doute beaucoup de petits rongeurs. Avec le semis direct, les plantes laissées sur place sont des abris pour la petite faune. « Mon sol n’a pas bougé depuis 10 ans, on peut dire que je suis devenu un éleveur de vers! »

Jules Beaudoin constate que des espèces de plantes indigènes telles que la verge d’or ou l’aster se font rares. Pour compenser, il a l’intention d’expérimenter avec le mélilot comme plante intercalaire biannuelle dans le soja, ce qui pourrait être un attrait pour les pollinisateurs. Il songe aussi à augmenter l’utilisation du seigle en couverture, une plante qui possède la capacité de réduire la présence de certaines mauvaises herbes, ce qui signifie moins d’herbicide. « Il faut faire attention de préserver la diversité biologique parce que la plante qu’on détruit, ce sera peut-être cette plante qui va nous sauver la peau par rapport à d’autres plantes. Il faut tout garder dans le fond, mais à la bonne place. »

Sur ses terres, les bandes riveraines sont réglementaires et à certains endroits, elles sont facilement le double de ce que le règlement exige. Elles sont laissées au naturel. Les plantes « sauvages » peuvent se multiplier. Le cornouiller, par exemple, forme des colonies spontanément, ce que Jules a bonifié avec des plantations effectuées en collaboration avec le comité de bassin versant sur lequel il a siégé comme administrateur.

Comment voyez-vous la collaboration entre les différents groupes de producteurs agricoles?

« J’assiste à beaucoup de conférences dans le milieu agricole dont le sujet, souvent, est la protection de l’environnement. Nous avons une formation continue comme dans bien des métiers ou professions. En approchant nos collègues agriculteurs pour changer des pratiques dans le but d’améliorer l’environnement, il faut « dorer la pilule », c’est-à-dire qu’il faut trouver un avantage pour le producteur. Moi, j’aime m’appuyer sur des fondements scientifiques. Mes pratiques culturales sont discutées et validées avec des professionnels en agronomie. Ces professionnels, en particulier les jeunes, sont très sensibilisés à la protection de l’environnement. Il faut avoir une approche progressive et ne pas avoir peur de remettre en question nos pratiques. »

L’agriculture chez Jules Beaudoin ne se transmettra peut-être pas à la prochaine génération. Mais la vision des Beaudoin concernant les pratiques agroenvironnementales sont partagées dans le voisinage et il y a un bel espoir de continuité dans la mouvance des changements qui se produisent dans le monde agricole.

image