11 octobre 2012 - 00:00
Griffintown : là où chaque cowboy a son histoire
Par: Le Courrier
<em>Griffintown</em>, Marie-Hélène Poitras, Alto, 2012, 210 p.

<em>Griffintown</em>, Marie-Hélène Poitras, Alto, 2012, 210 p.

<em>Griffintown</em>, Marie-Hélène Poitras, Alto, 2012, 210 p.

<em>Griffintown</em>, Marie-Hélène Poitras, Alto, 2012, 210 p.

Avec Griffintown, Marie-Hélène Poitras nous entraîne dans un monde glauque, une micro-société où les cochers du Vieux-Montréal, ces derniers cow-boys dans la ville, tentent leur dernière chance. Un regard nouveau sur un monde près de nous, en retrait de la modernité, et où tous les coups sont permis.

Peut-être le nom de Marie-Hélène Poitras vous dit-il quelque chose. Elle a reçu le prix Anne-Hébert pour son premier roman Soudain le Minautore, publié en 2002, et elle est l’auteure du recueil de nouvelles La mort de Mignonne et autres histoires, publié en 2005. Elle est également journaliste spécialisée en musique pour certains médias, dont le journal Voir, et elle est éditrice à la zone d’écriture de Radio-Canada.

Cette année, elle revient avec un polar western contemporain à la fois dur et poétique où histoires de meurtre, d’amour et d’envie se chevauchent. L’auteure ayant elle-même été cochère dans le Vieux-Montréal, elle expose au grand jour l’intimité des cochers, ces cow-boys dans la métropole qui « traînent plusieurs vies derrière eux ». Confrontés à la modernité, les cochers, comme les chevaux, tentent, chaque été, leur dernière chance. Personnages mythiques, les clochers de Griffintown ont tous leur histoire légendaire. On lit : « C’est pour les cochers l’avant-scène, un lieu de spectacle et de parade où l’on a intérêt à redresser l’échine et à bien jouer son personnage ».Et il y a beaucoup de personnages dans l’oeuvre de Poitras. Il y a « celui qui a trouvé l’or à Griffintown », Paul Despati, propriétaire de l’écurie et seigneur du domaine, et Billy, le palefrenier et dernier Irlandais orphelin à l’âge de 16 ans. Il y a également Evan, assistant du patron et ex-soldat en Afghanistan qui « a croisé un Windigo et ne s’en est jamais remis », Grande Folle, un vieux travesti prostitué ainsi que Léopold, alias Le Rôdeur, un sans-abri qui sert de commissionnaire. La Mère, Laura Despatie, qui confia l’écurie à son fils avant de partir Dieu sait où. Et il y a Marie, la jeune et jolie cochère, « le pied tendre dans la ville » que John le cow-boy solitaire prendra sous son aile.C’est d’ailleurs l’arrivée de Marie au Far Ouest qui inaugure le récit. Comme la jeune cochère, on découvre peu à peu les histoires qui circulent dans l’ouest de la Ville pour finir par comprendre la vraie histoire. Une histoire de conquête, de territoire et d’identité. Et c’est avec le meurtre de celui que l’on appelle le seigneur du domaine que Griffintown se dessine.

Un monde en marge de la loi

Ancien quartier ouvrier du sud-ouest de Montréal, Griffintown a été peuplé par les Irlandais au milieu du 19 e siècle. Dans son oeuvre, Poitras y décrit un univers qui a jadis eu son passé glorieux et où les hommes font leurs propres règles.

« En règle générale, les policiers ne viennent pas au Far Ouest; les autorités laissent les hommes de chevaux régler leurs affaires entre eux, en autant que leurs histoires ne débordent pas les frontières du territoire. » Dès le début, l’auteure prend soin de créer un climat. Et plus l’histoire progresse, plus ce monde se dévoile et prend forme. Malgré tout, ces cochers qui souvent se font traiter comme des bêtes cachent au fond un coeur tendre et une volonté de fer à récidiver malgré les blessures et les cicatrices.Mais comme tout bon western, les cow-boys tenteront de préserver ce territoire menacé. Et, par la vengeance, certains tenteront de sauver leur honneur, tandis que d’autres récolteront les conséquences.

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