7 juillet 2016 - 00:00
La bibliothèque du Séminaire de Saint-Hyacinthe (3)
Par: Le Courrier
Voici le local de l’Index surnommé « l’enfer ». Photo : Bibliothèque du Séminaire de Saint-Hyacinthe

Voici le local de l’Index surnommé « l’enfer ». Photo : Bibliothèque du Séminaire de Saint-Hyacinthe

Voici le local de l’Index surnommé « l’enfer ». Photo : Bibliothèque du Séminaire de Saint-Hyacinthe

Voici le local de l’Index surnommé « l’enfer ». Photo : Bibliothèque du Séminaire de Saint-Hyacinthe


Curiosité historique

À la mezzanine de la grande salle de la bibliothèque, il existe un vestige architectural d’une politique de sauvegarde de la morale catholique. Il s’agit des grillages en métal et de la porte grillagée en bois avec serrure qui sont toujours présents pour indiquer où se trouvait « l’Enfer », comme le surnommait les anciens élèves du collège classique. Cela s’appelait plus officiellement le local de l’Index. Il est ici question du local des livres mis à l’Index par la Congrégation de l’Index. Cet endroit était gardé sous clé et n’était accessible qu’au prêtre-bibliothécaire, au personnel de la bibliothèque ou aux prêtres ayant le droit de consulter les livres interdits. Seuls, le supérieur du Séminaire et le bibliothécaire possédaient la clé de cette porte. La serrure fonctionne encore.

En 1983, les livres mis à l’Index étaient encore présents dans cette section grillagée. À cause du manque d’espace pour les périodiques profanes et avec l’autorisation du bibliothécaire et archiviste, Mgr Léo Sansoucy, tous les livres interdits ont été déplacés et intégrés à la collection générale des monographies.

Malheureusement, personne n’a pensé à relever les titres de ces ouvrages de la section de l’Index avant son démantèlement. Un document datant de 1935 signale que l’Index contenait 792 volumes.

La Congrégation de l’Index était située au Vatican. Elle avait pour mandat de faire respecter la morale catholique en scrutant tous les écrits publiés et pouvant être lus par les catholiques. Bref, il s’agissait de censurer les textes ou d’en interdire la lecture si l’auteur ou l’éditeur refusait de censurer leur contenu.

Pour pouvoir lire un livre interdit par l’Index, il fallait obtenir la permission écrite de son évêque et toujours la conserver avec soi. Si vous étiez pris en train de lire un ouvrage mis à l’Index, vous deviez remettre ipso facto le livre à l’ecclésiastique, sinon vous étiez immédiatement excommunié. L’excommunication d’un catholique vivant dans un milieu totalement catholique pouvait signifier l’exclusion de son milieu social, des pertes économiques soit en perdant son emploi, des pertes de revenus ex. : pour un marchand si sa clientèle refuse d’acheter ses marchandises à cause des avertissements du curé lors de son prêche dominical qui le signale comme n’étant plus catholique.

Historique de l’Index

La politique de la mise à l’Index a existé pendant très longtemps. La première fois où elle fut appliquée avec rigueur, ce fut au Concile de Nicée en l’an 325. L’Église y condamna l’ouvrage « Thalia » écrit par Darius. Cette politique de censure fut en vigueur jusqu’au Concile Vatican II. En 1965, l’Église décida alors que les catholiques étaient assez responsables pour éviter de lire ce qui ne leur était pas recommandable.

Les livres censurés étaient considérés comme subversifs à cause de leurs idées véhiculées, trop libérales, trop socialisantes, trop érotiques ou pour toute autre raison liée à la morale et aux dogmes de l’Église catholique de l’époque.

Depuis le règne du pape Paul IV, Pietro Carafa 1476-1559, l’Église a établi, en 1559, une liste des interdits de lecture. Cette pratique se perpétua, puis fut administrée par la Congrégation de l’Index de 1562 à 1965. L’administration de la censure catholique était rendue nécessaire à cause des nouveautés technologiques de l’imprimerie et du nombre croissant de documents publiés.

La lecture se démocratisa avec la création des écoles et l’alphabétisation déclassa l’Église dans son rôle monopolistique du savoir. La Congrégation de l’Index rassembla tous les feuillets proclamés sur les livres censurés depuis le début de cette politique et elle publia périodiquement un livre intitulé « Index Librorum Prohibitorum » qui contenait la liste des livres prohibés. Habituellement, les livres étaient classés par la date de la mise à l’Index ou par auteur, afin d’être accessible à tous les catholiques, le texte était imprimé en latin afin que n’importe quel ecclésiastique sur le globe puisse le lire sans être obligé d’attendre une traduction dans sa langue natale.

À la bibliothèque du Séminaire, les livres mis à l’Index portent la mention « LIVRE À L’INDEX » inscrite en rouge ou en noir et soulignée. De plus, à l’intérieur des livres condamnés, la même mention « LIVRE À L’INDEX » est inscrite sur la page de garde et parfois sur la page titre, afin de bien avertir le lecteur qu’il condamnait son âme en lisant le contenu du document. Les autorités du Séminaire ont tenu à conserver ces reliquats architecturaux afin de bien signifier aux plus jeunes que de telles pratiques ont existé au Québec et à travers le monde entier.

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