23 août 2012 - 00:00
La qualité fait plaisir, le défaut fait fuir
Par: Hélène Dion
Le « pipi de chat » du sauvignon, le poivron vert du cabernet franc, le côté végétal de la carménère, l’eucalyptus d’un shiraz australien, ces arômes vous plaisent? Et le caoutchouc brûlé du pinotage, c’est une odeur que vous aimez? C’est ce que Fred Fortin, collaborateur du blogue Cellier, a demandé aux internautes sur la question des vins sud-africains dans son texte « Dérapage contrôlé? : « Ces arômes de caoutchouc brûlé, s’ils existent réellement, doivent-ils être considérés comme des défauts du vin? »

Toute une question. Un casse-tête. Un mystère. D’abord, revenons en arrière, en 2007, lorsque la journaliste du Times de Londres, Jane MacQuitty, vilipende les vins sud-africains. Elle écrit alors que « la moitié des vins sud-africains, dégustés lors de son passage au pays plus tôt dans l’année, présentent des odeurs « étranges, sauvages et de caoutchouc brûlé » (traduction libre reprise dans le blogue Cellier). Après cette déclaration, imaginez les producteurs offusqués, avec raison, d’être la cible d’une telle généralisation. Des critiques de vin ont rejoint les rangs de Mme MacQuitty en partageant ses impressions, d’autres non. Quoi qu’il en soit, Wines of South Africa a pris l’affaire au sérieux et a engagé une série de recherches sur ce sujet. Les études de l’université de Stellenbosh, zone viticole importante, ont démontré qu’il n’y aurait aucun lien entre le terroir, le cépage, le millésime et l’arôme détecté. On a alors pointé du doigt les composés soufrés volatils comme possibles responsables de l’odeur de caoutchouc brûlé. Mais ce problème, relate le SAWIS (South Africa Wine Industry Statistics), est présent partout dans le monde et ne constitue pas un problème sud-africain, ni lié au cépage visé, le pinotage (cépage typiquement sud-africain issu du croisement entre le pinot noir et le cinsault). Cet arôme, s’il existe, est-il un défaut? À première vue, je répondrais que oui. Le défaut se différencie de la qualité en ce qu’il résulte d’un manquement à la vigne ou au chai. Alors que la qualité réfère au caractère, à la typicité d’un vin. La qualité fait plaisir, le défaut fait fuir. Quand j’hume la poire dans un chardonnay, ou l’abricot dans un viognier, j’aime. Quand je sens le caoutchouc brûlé, cela me rebute. Et ce qui repousse est enregistré comme un défaut.  Par contre, tout est question d’interprétation, de goût et du pouvoir de la persuasion. Cela me rappelle ma rencontre avec Vincent Burher en 2011. Le directeur général du domaine Saxenburg en Afrique du Sud avait précisé vouloir mettre l’accent sur ce côté « fumé » du vin Guinea Fowl, issu de cabernet, merlot et syrah… Ce côté fumé, brûlé, devenait la typicité, la qualité du vin…

Des explications?

Le collaborateur de Cellier pousse plus loin en posant une deuxième question à ses internautes. « Comment peut-on expliquer la présence de ces odeurs? Les sols, la fermentation, l’élevage en barrique…? »

D’abord, on parle de trois types d’arômes dans le vin. Il y a les arômes variétaux (primaires) liés directement à la variété de raisin. Par exemple, l’arôme de pamplemousse du sauvignon. Il y a les arômes fermentaires (secondaires) qui se développent en cours de fermentation. L’odeur d’oeuf pourri (mercaptan) survient à une mauvaise utilisation du soufre dans un milieu réducteur. L’arôme végétal/côté vert d’un vin survient après un contact prolongé entre la rafle et le vin. Dans un autre ordre d’idée, un arôme de banane provient de l’utilisation d’une levure spécifique. Enfin, les arômes de vieillissement (tertiaires) peuvent être liés au fût qui interagit avec le vin. L’arôme de « brett » vient du nom des levures brettanomyces. En cours d’élevage dans les fûts de chêne, cette odeur (que certains trouvent naturelle et que d’autres qualifient de défaut) apparaît et une mauvaise hygiène fait en sorte que cette levure « s’attaque » aux équipements de vinification et d’élevage. À la question de Fred Fortin, ami et collègue, je me contenterai de répondre que je ne peux prétendre à une explication et souhaiter que les études qui se poursuivent à la South African Society for Enology and Viticulture seront concluantes et mettront un terme à cette polémique.

Vin et politicien

On m’a demandé d’associer un vin à un chef de parti dans le cadre de la campagne électorale.

Défi difficile à relever, je vous laisse découvrir cette capsule que j’ai eu le plaisir de tourner en compagnie de collègues sommeliers, Simon Duval, Jessica Harnois et Marie-Josée Beaudoin. Voyez la vidéo sur le site lapresse.ca dans la section vin, nommée « Cuvées électorales ».

Pour tenter l’Afrique du Sud avec goût!

– Guinea Fowl Merlot-Cbernet-Shiraz – Stellenbosh 2010 – Code SAQ : 10678026  – Prix : 15,80 $ – Glen Carlou – Syrah – Paarl 2007 – Code SAQ : 10679310 Prix : Prix : 20,25 $ – Glen Carlou – Cabernet Sauvignon – Paarl 2010 – Code SAQ : 11155198  Prix : 18 $

Une suggestion en blanc

– Sauvignon Blanc Monkey Bay Marlborough 2011 – Code SAQ : 10529936 – Prix : 14,95 $

Blanc aromatique avec des notes de fruits exotiques, du pamplemousse, avec une note d’asperge, mais très délicat. En bouche, c’est super agréable, fruité, gourmand. Un vin pour les derniers moments de piscine avant l’automne! -30-

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