21 décembre 2017 - 00:00
Maçonnerie du Marché public
La Ville défend son choix
Par: Le Courrier
La Ville défend son choix

La Ville défend son choix

La Ville défend son choix

La Ville défend son choix

Richard de la Riva, au cours du point de presse du 14 décembre à l’hôtel de ville.   Photo François Larivière | Le Courrier ©

Richard de la Riva, au cours du point de presse du 14 décembre à l’hôtel de ville. Photo François Larivière | Le Courrier ©

La Ville de Saint-Hyacinthe a tenu, jeudi dernier, une deuxième conférence de presse en autant de semaines pour expliquer son choix de procéder au remplacement complet du parement de briques du Marché public, construit en 1876-1877.


À la première occasion, le 30 novembre, le point de presse avait été animé par le maire Claude Corbeil, le directeur du service des Travaux publics, Yvan De Lachevrotière, le surintendant aux immeubles et espaces verts, François Tessier, en présence du conseiller du district Cascades, Jeannot Caron.
À la rencontre du 14 décembre, le directeur général, Louis Bilodeau, et la conseillère Claire Gagné se sont joints au groupe initial avec quelques-uns des experts qui sont intervenus à divers moments dans le dossier : Richard de la Riva, l’architecte qui a préparé les plans et devis du projet de réhabilitation du Marché, Luc O’Neill, ingénieur en structure du bureau EXP, Réal Heine, de Heine & Frères, firme spécialisée en maçonnerie qui a effectué des percées exploratoires dans les murs du Marché sous la supervision du bureau d’architectes Beaupré Michaud. C’est vers Beaupré Michaud que la Ville s’était tournée il y a quatre ans pour que soit établi le « carnet de santé » du Marché public, un rapport qui lui est parvenu en octobre 2013. C’est ce carnet de santé qui a servi de base à la réflexion.
« La Ville n’a pas agi de façon improvisée dans ce dossier. Elle a été accompagnée en tout temps par des professionnels et est restée tout le temps très consciente qu’il s’agit d’un joyau patrimonial. Je suis donc très étonné qu’on ait ces débats-là », a commenté Louis Bilodeau après les interventions des experts présents. Il faisait allusion à des points de vue exprimés sur le sujet dans LE COURRIER, notamment ceux d’observateurs externes et de citoyens qui condamnent la décision de la Ville de remplacer les briques anciennes par des briques d’imitation, dont la Ville a exhibé quelques échantillons.
« Ils ont raison d’être inquiets. Il y a beaucoup d’exemples dans notre pratique où on a fait de grands détours pour conserver les matériaux originaux », a reconnu Richard de la Riva, estimant que, sur cette question, on se dirigeait « vers une guerre d’experts ». Il recommande néanmoins l’enlèvement des vieilles briques, notamment parce qu’il les trouve « un peu trop molles » et très abîmées. Il soutient qu’elles ont perdu leur biscuit – la face protectrice exposée – et que c’est pour masquer les cicatrices apparues avec le temps que la Ville s’est résolue à peindre le parement en rouge en 1984 (le Marché avait d’abord été peint en vert, dans les années 1970).
Boutisses
Il a ajouté que le rang de briques du parement n’était pas relié aux deux rangs de briques intérieurs par un nombre suffisant de boutisses, ces briques posées de manière à attacher ensemble tous les rangs du mur porteur. L’ingénieur O’Neill a indiqué qu’on trouvait des boutisses seulement autour des fenêtres (on en compte tout de même une cinquantaine à l’étage seulement). « On voit à certains endroits qu’il y a eu du mouvement. Le problème n’est pas seulement esthétique, il est aussi structural (…). Ce n’est pas de gaieté de cœur qu’on propose un remplacement parce qu’on privilégie toujours la conservation. Mais dans ce cas-ci, ça ne fonctionne pas, on n’a pas confiance en la pérennité du matériel », a conclu cet architecte qui a notamment travaillé à la restauration du Marché Bonsecours du Vieux-Montréal.
Louis Bilodeau lui a demandé s’il avait déjà réalisé de semblables remplacements de briques. « Jamais de cette étendue-là », lui a-t-il répondu.
Richard de la Riva a admis que la conservation du parement était possible, moyennant le remplacement d’un certain nombre de briques, comme il le mentionnait d’ailleurs dans la lettre datée du 7 avril 2017 qui contenait sa recommandation et dont la Ville a remis une copie au COURRIER, avec un extrait du « carnet de santé ». Pour cette alternative – qu’il a qualifiée de « solution band aid » au point de presse -, M. de la Riva suggérait d’appliquer un enduit protecteur non imperméable permettant à la brique de respirer, solution exigeant un entretien régulier par la suite, à tous les 10 ans selon son estimation.
Décision du conseil?
Mais la pérennité des interventions faites au Marché public est l’un des principaux objectifs que la Ville s’est fixés dans le dossier, ont rappelé Louis Bilodeau et Yvan De Lachevrotière. « On gère des fonds publics et on assume nos choix », a lancé le directeur des Travaux publics.
Le maire Claude Corbeil a laissé entendre, quant à lui, que toutes les interventions au Marché public reflétaient la volonté des élus. « Le projet émane du conseil précédent. Là, on est rendu à la brique, et le conseil précédent a fait des choix. Ensuite l’administration applique les décisions du conseil », a-t-il dit.
Mais deux anciens conseillers interrogés par LE COURRIER ne se souviennent pas d’avoir approuvé le remplacement de la brique. « Je n’en suis pas certain à 100 %, mais je n’ai pas le souvenir qu’on nous ait dit ça, et j’imagine que ça m’aurait fait sursauter un peu. Ma mémoire me dit qu’on n’avait pas décidé de changer la brique au grand complet, qu’il y avait d’autres pistes de solution », se rappelle Alain Leclerc.
Sylvie Adam ne se souvient pas non plus qu’il ait été question au conseil de tout remplacer par de la brique neuve. « Pas au moment où j’étais en poste. Est-ce qu’on a discuté de la brique au comité consultatif d’urbanisme (CCU)? C’est une bonne question, mais je n’en ai pas le souvenir non plus. »
Nicole Dion-Audette, qui siège toujours au CCU, ne croit pas que le conseil ait pris une décision au sujet de la brique du Marché. « Je n’irais pas jusque là. On était encore dans le questionnement, et je pense qu’on va se questionner encore », a-t-elle confié au COURRIER.

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