10 décembre 2015 - 00:00
Commission Charbonneau
Le rapport et la transparence
Par: Le Courrier

Monique Dumont, ancienne recherchiste en chef de l’émission Enquête de Radio-­Canada et experte de la FPJQ en matière d’accès à l’information, a lu le rapport de la ­Commission Charbonneau. Voici son analyse :

Dans son rapport rendu ­public ce mardi, la ­Commission d’enquête sur l’octroi et la ­gestion des contrats ­publics dans l’industrie de la construction (CEIC) ­souligne comment le « manque de ­transparence » a contribué à créer les ­situations dénoncées.

Elle souligne que « l’OCDE considère la transparence comme un des grands ­principes à suivre pour renforcer ­l’intégrité dans les marchés publics et notamment pour lutter contre la ­collusion et la corruption. La transparence réfère à la diffusion d’informations relatives à des institutions publiques et susceptibles d’en permettre l’évaluation … elle est un moyen pour les citoyens de surveiller l’exercice que les ­institutions publiques font de leurs ­pouvoirs ».

Elle ajoute : « La transparence suppose l’accessibilité aux informations liées aux processus qui entourent l’octroi et la ­gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction. Mais elle suppose aussi que les informations accessibles soient compréhensibles et utiles… ». « Faire oeuvre de transparence utile » ­écrit-elle dans son Rapport. Elle conclut : « Le manque de transparence a facilité l’émergence et le maintien de stratagèmes que la Commission a mis au jour ».

Parmi ses recommandations, la ­Commission estime que les organismes à but non lucratif – les fameux OBNL mis en place par les municipalités notamment – et les sociétés paramunicipales soient ­soumis à toutes les règles de ­transparence des organismes qui les créent. Elle écrit : « Assujettir l’ensemble des sociétés paramunicipales et des OBNL contrôlés ou subventionnés par un organisme public ou une municipalité aux mêmes obligations contractuelles que les organismes auxquels ils sont liés. » En clair, cela ­signifie concrètement que ces organismes doivent être ­assujettis à la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics.

Le ministre Jean-Marc Fournier, qui ­prépare sa réforme de la Loi, en tiendra certainement compte dans son projet de loi à venir. C’est une revendication de longue date de la FPJQ. Autre recommandation touchant les municipalités : que toutes les délibérations des élus ­municipaux soient publiques afin de ­limiter les exceptions au débat public. Il y a en effet dans l’actuelle Loi sur les cités et villes des dispositions qui permettent de tenir des séances à huis clos et d’en garder confidentiel le contenu jusqu’à un an. Des municipalités utilisaient ce stratagème d’une séance à huis clos du Conseil exécutif tenue à une heure indue pour octroyer, à l’abri des regards, des contrats, vendre des propriétés publiques ou accorder des exemptions relatives aux règlements de zonage. La Commission recommande de s’inspirer de l’Ontario qui exige que toute réunion d’un conseil municipal, d’un conseil local ou d’un ­comité doive se tenir en public. En ­corollaire, les documents doivent être ­accessibles.

Sur un autre mode, la Commission ­recommande de protéger certaines ­informations névralgiques comme la ­composition des comités de sélection qui étudient les contrats publics. On se rappelle que les firmes d’ingénierie et autres acteurs pouvaient connaître la composition des­ ­comités de sélection, ce qui était refusé aux journalistes qui en ­faisaient la demande. La Commission ­recommande d’assurer la confidentialité des noms des membres des comités de sélection et de l’identité des ­preneurs de documents d’appels d’offres qui ­choisissent de se prévaloir de cette confidentialité.

En conclusion, la transparence est une préoccupation importante de la ­Commission dans ce Rapport qui a pour ­objectif de changer les moeurs du milieu afin que corruption et collusion soient à l’avenir tenues en échec au Québec.

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