6 février 2014 - 00:00
L’Écologiste qui avait besoin d’une raison (dernière partie – l’implication)
Par: Le Courrier

Dans une chronique précédente, je vous faisais part de mon dilemme moral d’écologiste convaincu face à un voyage rêvé depuis longtemps vers la Nouvelle-Zélande. Juste en gaz à effet de serre produit par l’avion et le campervan loué, ma fille et moi allions produire 10 365 kg de CO2 en deux mois alors qu’un Canadien moyen en produit un peu plus de 6 tonnes par année et qu’un écologiste convaincu peut atteindre 2 tonnes seulement. C’est comme si ce voyage me faisait produire autant de CO2 en deux mois que je ne le faisais en cinq années de vie « normale ». Il fallait donc que je « retire » 10 365 kg de CO2 de l’atmosphère pour me déculpabiliser.

L’information circule qu’il suffit de planter des arbres pour avoir l’esprit tranquille. Mais combien? Et dans quelles conditions? Selon l’information disponible sur Internet, il faut planter entre 10 et 10 000 arbres. Cette différence vient essentiellement des différentes conditions dans lesquelles ces arbres poussent. Mais si on revient à l’essentiel, le CO2 soutiré de l’atmosphère (les experts parlent de séquestration du CO2) s’accumule dans l’arbre (dans toutes ses parties : racines, tronc, branches et feuilles). Les spécialistes en foresterie peuvent confirmer que, quel que soit le type d’arbre et les conditions de croissance, il faudra que mes arbres atteignent un poids total d’environ 8,3 tonnes pour avoir séquestré une quantité équivalente de CO2 que ce que ma fille et moi avons généré durant notre voyage au pays des Kiwis… Bon, et concrètement, que devrais-je faire? Si je plante des arbres dans ma cour, je devrai donc m’assurer qu’ils atteindront une masse totale de 8,3 tonnes avant de les couper. Si je demande à la Ville de planter des arbres que j’achèterais, je devrai alors m’assurer qu’ils seront toujours vivants jusqu’à ce qu’ils atteignent une masse totale de 8,3 tonnes. Si je finance un programme de reboisement des forêts publiques, je devrai m’assurer que la somme des arbres plantés permettra d’emmagasiner 8,3 tonnes de CO2 avant que ces arbres ne soient coupés (et ce sera beaucoup plus long à Chibougamau qu’en Montérégie ou encore en Amazonie). Bref, ce qu’il faut faire, c’est de s’assurer que la masse d’arbres puisse croître. Pourquoi ne pas investir dans un fonds commun de placement permettant de protéger des forêts de la destruction? Et qui sait, peut-être qu’un jour les « écologistes » seront propriétaires de l’ensemble des forêts mondiales et qu’ils seront consultés par les économistes pour savoir comment « libérer » des forêts pour le développement économique. Il est possible que mes placements ne soient pas les plus rentables à court terme, mais j’aurai au moins contribué à la survie de ma fille. Sans compter que, si les écologistes possèdent la majorité des forêts mondiales, ces dernières vaudront leur pesant d’or. Tout compte fait, c’est le plus beau cadeau que je puise lui faire, avant et après que je ne décède. P.S. Et il n’y a pas qu’un voyage en Nouvelle-Zélande qu’il faut considérer. Chaque plein d’essence (de 43L) produit 100 kg de CO2 et nécessite une augmentation de 80 kg de forêt pour le recapter. À quand le moment où votre pompiste vous proposera « un petit certificat de propriété forestière avec ça? »

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