6 octobre 2011 - 00:00
Carte postale de Janie Guilbert
Les fantômes de York
Par: Le Courrier

Octobre, sous la grisaille. Au détour des rues étroites, à l’ombre de la cathédrale, des piétons, parapluies à la main, s’engouffrent dans les pubs. À York, petite ville perchée au nord de l’Angleterre, survit une vieille âme figée dans le temps.

C’est dans cet univers énigmatique que s’est établie Janie Guilbert, originaire de Saint-Barnabé, pour y rejoindre l’amour de sa vie. Après avoir travaillé pendant plusieurs mois pour gagner sa croûte et apprendre l’anglais aux accents british, Janie a complété un programme en enseignement à l’Université d’York. Depuis deux ans, elle enseigne le français dans une école secondaire, avec l’accent québécois en prime!

Fondée par les Romains, conquise par les Vikings et les Normands, York est un concentré d’histoire qui se visite à pied. De fait, même les locaux ne s’aventurent pas en voiture dans les rues exiguës, la plupart étant d’ailleurs réservées aux piétons.York est souvent plongée dans une grisaille de plusieurs jours, mais ses températures clémentes assurent des gazons verdoyants et des fleurs à longueur d’année. « Même quand il pleut, il ne fait pas vraiment gris, à cause des couleurs des arbres et des plantes. C’est un contraste qui rend tout très beau, très brillant », raconte Janie.Dans son pays d’adoption, pas question de laisser Dame nature dicter l’agenda. « C’est très Québécois de regarder la météo avant de sortir. Ici, les gens font ce qu’ils ont à faire, beau temps mauvais temps. Et la grisaille n’est pas toujours désagréable. Il y a quelque chose de réconfortant à se réfugier dans un café, sur le bord d’un foyer. »Pour commencer le séjour du bon pied, Janie propose de découvrir les rues typiques de la bourgade, surplombées par le York Minster, la plus grande cathédrale gothique de l’Europe du Nord. Il faut d’abord voir The Shambles, sorte de chemin de Traverse à la Harry Potter – la boutique de baguettes magiques en moins – où les vieilles maisons aux charpentes de bois, tordues par le temps, se rejoignent presque à leur sommet. S’y entassent les chocolatiers, bijoutiers et cafés intimes, mais surtout, bien des fantômes qui rendent chacune de ses adresses célèbres. « En soirée, il faut s’inscrire à l’un des tours guidés par des conteurs, qui s’arrêtent devant les maisons et en racontent les légendes. Chaque petite porte en bois a son histoire d’apparitions, de meubles qui bougent. C’est une merveilleuse façon de découvrir l’endroit. »Pour une autre rencontre avec l’histoire et ses fantômes, c’est aux fortifications de la ville, érigées par les Romains, qu’il faut se rendre. Il est encore possible de circuler sur le mur pour faire le tour de la cité depuis la Tour de Clifford, du nom d’un rebelle au roi Édouard II qui fut pendu à son sommet au terme d’une bataille épique en 1322. Pour fuir le ciel gris quelques heures, Janie propose la visite de deux musées. Le premier, le Yorkshire Museum, revisite l’histoire de la région de ses premiers habitants à aujourd’hui. « C’est bien beau l’histoire, mais quand on voyage, c’est intéressant de découvrir l’image contemporaine de la ville et les débats qui animent la population. »Seconde adresse muséale à retenir pour une expérience unique, celle du Jorvick Viking Centre, qui propose une visite souterraine dans un village viking. « C’est un peu comme s’enfoncer dans la Maison hantée à la Ronde. Disons que c’est un souvenir inoubliable. Tout est recréé en détail, jusqu’aux odeurs, assez désagréables merci », décrit Janie.

À l’anglaise

Les traditions anglaises sont bien encrées dans la population et il vaut la peine pour tous les visiteurs d’essayer de s’en imprégner.

Les plus chanceux pourront participer à un Sunday Dinner, un souper familial autour d’un morceau d’agneau ou de boeuf, accompagné de carottes, de panais et de patates, mais surtout du fameux Yorkshire pudding, une sorte de pain soufflé au four. « Il y a toujours une compétition à savoir qui fera le meilleur Yorkshire pudding dans la famille, c’est-à-dire celui qui sera le plus gonflé. À York, pas question de s’attabler tant que le pain n’est pas sur la table. »Ceux qui visiteront la région pendant l’été ne voudront pas manquer d’assister aux courses de chevaux, très populaires dans tout le pays. Sortez vos chapeaux à plumes, mesdames; les courses ne sont pas que l’occasion de parier, elles sont aussi le moment de revêtir ses plus beaux atours pour un après-midi entre amis. « Les gens se mettent sur leur 36 pour les courses. Les femmes portent les chapeaux, comme dans les films. Il y a du champagne, des bouchées et le thé, évidemment. »L’heure du thé, véritable institution en Angleterre, sonne entre 15 h et 17 h. Pour vivre pleinement l’expérience à York, Janie propose de commander un Cream Tea chez Bettys, son salon de thé préféré. « C’est le thé traditionnel, servi avec des scones, de la crème, des confitures et des fraises fraîches. C’est délicieux et raffiné. »Mais pour prendre le plein goût de York, c’est dans les pubs qu’il faut s’aventurer. Tout en boiserie, les petits bars sont l’âme de la ville. Une authentique soirée anglaise permettra aux visiteurs d’en prendre la pleine mesure. « Boire à l’anglaise, c’est prendre un verre dans un pub, puis se rendre à celui d’à côté pour le prochain verre, et ainsi de suite. C’est un circuit. Pas question de veiller au bar raconte Janie en riant. » Reste qu’il s’agit de la meilleure façon de découvrir des lieux pleins de cachet et de caractère, comme le Ackhorne et le Brigantes, ainsi que les bières locales.Vagabondant d’un pub à l’autre au coeur de la nuit, dans le brouillard qui recouvre les pavés de pierres, toutes les conditions seront alors réunies pour rencontrer les fantômes de York.

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