15 juin 2017 - 00:00
Maintenir la gestion de l’offre pour garantir notre souveraineté alimentaire
Par: Le Courrier

La lecture du rapport du vérificateur général du Canada, Michael Ferguson, m’a fait bondir. Je sais que les Libéraux ont abandonné les producteurs laitiers dans le dossier du lait diafiltré, même chose pour les producteurs de poulet avec la volaille de réforme. Mais j’étais loin de me douter qu’ils contrôlaient aussi mal les importations des produits sous la gestion de l’offre. 

En effet, le vérificateur général nous apprend dans son rapport que le gouvernement Trudeau a laissé entrer 131 M$ de marchandises sous gestion de l’offre, dont 32 M$ en produits laitiers. Ces importations, majoritairement en provenance des États-Unis, ont nécessairement engendré des pertes importantes pour l’industrie canadienne. Lorsque l’on est, comme moi, députée fédérale d’une Technopole agroalimentaire, ce constat est franchement préoccupant… Surtout si le montant avancé représente 168 M$! 

Car oui, 168 M$ sont manquants, car ils n’ont pas été perçus en droit de douane par l’Agence de service frontalier pour des produits agricoles à caractère contingenté. À ce titre, le vérificateur expose le fait suivant : « … l’intégrité du système de contingents tarifaires dépend de la capacité du gouvernement à veiller à ce que tous les importateurs respectent toutes les règles et réglementations applicables ». Le contrôle des importations est une obligation gouvernementale qui assure le bon fonctionnement du système de gestion de l’offre agricole. Le lait diafiltré et ce rapport nous démontrent que les libéraux ne prennent pas ce rôle au sérieux. 

Dans ce même rapport, le vérificateur général conclut que l’Agence des services frontaliers a peu de contrôle en place pour s’assurer que les marchandises importées via le programme d’exonération des droits sont déclarées si elles ne sont pas exportées par la suite. « … Si des importateurs écoulent sur le marché canadien des marchandises qui sont destinées à l’exportation et pour lesquelles aucun droit de douane n’est perçu, cela crée une situation de concurrence déloyale pour les producteurs canadiens », invoque le vérificateur. 

Nos producteurs sous gestion de l’offre l’expriment depuis longtemps, et les députés un tant soit peu à l’écoute, le savent pertinemment : ce programme ne devrait pas inclure les produits agricoles. Les importations sans frais de douanes faites par l’entremise de ce programme créent une concurrence déloyale pour nos producteurs et génèrent des pertes pour l’industrie. 

Au-delà des pertes financières, mon inquiétude se pose également sur l’absence de contrôle de la qualité des produits alimentaires qui entrent chez nous. Au Canada, nous exigeons de nos producteurs agricoles d’atteindre les plus hauts standards de qualité que commande l’industrie. Ici, la santé des consommateurs est au cœur de nos préoccupations. Peut-on en dire autant de nos voisins du Sud? Sans l’uniformisation universelle des pratiques agricoles, pouvons-nous affirmer hors de tout doute que les aliments qui se retrouvent dans notre assiette ne nuisent pas à notre santé? 

Récemment, le débat agricole s’est vraisemblablement invité dans la course à la chefferie du parti Conservateur. En bloquant le couronnement de Maxime Bernier, seul candidat ouvertement en faveur de l’abolition du système de gestion de l’offre, les membres du Québec ont envoyé un message clair : les parlementaires ont le devoir de défendre notre système de gestion de l’offre! 

Malheureusement, force est d’admettre que le parti Conservateur n’est pas le meilleur élève lorsqu’il est question de protéger notre agriculture. Avons-nous besoin de rappeler qu’il y a moins de deux ans, le gouvernement Conservateur était prêt à sacrifier la gestion de l’offre au profit d’obscurs avantages économiques négociés à huis clos, dans le cadre du Partenariat Trans-Pacifique? 

Aujourd’hui, le secteur agricole doit solidifier ses appuis et reconnaître le fait suivant : seuls les députés néodémocrates adoptent inlassablement une position claire et ferme en défendant farouchement à la Chambre des communes le maintien de la gestion de l’offre en agriculture. Nous l’avons démontré avec la motion pour les compensations en lien avec l’AECG, notre position en campagne concernant les brèches du PTP ainsi que notre motion d’opposition sur le lait diafiltré. 

Je termine par une mise en garde, attention aux belles paroles, alors que les libéraux continuent de répéter leur engagement à protéger le système de gestion de l’offre, leurs actions mettent en évidence tout le contraire. Premièrement, ils ont voté contre notre motion sur le lait diafiltré et n’ont toujours rien fait à ce sujet. Deuxièment, le plan de transition prévu pour « compenser » les producteurs et les fromagers à la suite de l’AECG est hautement insuffisant et inadéquat. Troisièmement, le rapport du vérificateur général vient démontrer leurs difficultés à jouer leur rôle de contrôleur des importations. Les Conservateurs deviennent, pour leur part, bien silencieux quand vient le temps de positionner dans leurs priorités la protection du système de gestion de l’offre pour les œufs, la volaille et le lait…

Quand le gouvernement, appuyé par l’opposition officielle, prendra-t-il enfin les moyens pour protéger un système qui fonctionne et qui nous fournit en quantité suffisante, à un prix raisonnable, des produits de qualité d’ici que nous consommons tous les jours? La campagne communicationnelle « Forts et unis » déployée par l’UPA m’a permis de réaliser à quel point le lien entre notre réfrigérateur et notre agriculture est important. Produits laitiers, œufs, volaille, la gestion de l’offre est essentielle puisqu’elle assure notre souveraineté alimentaire et le contrôle de la qualité de la nourriture que nous mangeons, deux enjeux prioritaires qui nous concernent tous!

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