7 juillet 2016 - 00:00
Poissons morts
Mea maxima culpa
Par: Rémi Léonard
Mea maxima culpa

Mea maxima culpa

Mea maxima culpa

Mea maxima culpa

Christian Blanchette, coordonnateur régional d’Urgence-Environnement pour l’Estrie-Montérégie, Claude Corbeil, maire de Saint-Hyacinthe, et Chantal Frigon, directrice générale adjointe de la Ville. Photo Robert Gosselin | Le Courrier ©

Christian Blanchette, coordonnateur régional d’Urgence-Environnement pour l’Estrie-Montérégie, Claude Corbeil, maire de Saint-Hyacinthe, et Chantal Frigon, directrice générale adjointe de la Ville. Photo Robert Gosselin | Le Courrier ©

Après avoir cherché plus de trois jours la cause pouvant expliquer la mort de milliers de poissons dans la rivière Yamaska, la Ville de Saint-Hyacinthe a finalement découvert lundi le pot aux roses au dernier endroit où elle l’aurait souhaité : dans sa propre cour.

Un déversement planifié d’eaux usées à la station d’épuration de la Ville a en effet eu lieu le 28 juin, a admis le maire Claude Corbeil. Les travaux d’agrandissement aux installations de biométhanisation nécessitaient une coupure temporaire du courant, forçant ainsi l’arrêt de l’usine située sur la rue Girouard Est, en aval du centre-ville.

Au total, 8,5 millions de litres d’eau non traitée, l’équivalent de trois piscines olympiques et demie, se sont donc jetés dans une rivière qui était pratiquement à sec, avec un débit de 3,5 m3/s ce jour-là. Les eaux usées ont ainsi saturé la rivière déjà très basse, causant l’asphyxie de milliers de poissons dans une zone allant de la station d’épuration jusqu’à un kilomètre plus loin en aval, a reconnu la Ville.

La repoussante découverte a été faite au Rapide-Plat Nord par des citoyens le jeudi 30 juin en fin de journée. Urgence-Environnement a alors été avisé et les recherches ont débuté en examinant des pistes comme les rejets d’entreprises industrielles du secteur ou des facteurs plus naturels comme le bas niveau de l’eau, avant d’aboutir à la conclusion que l’on connaît.

Un très long weekend

Les élus et la direction générale de la Ville ont soutenu avoir appris l’existence de cette surverse seulement le lundi 4 juillet, en avant-midi. Prévu quelques heures plus tard la même journée, le point de presse visant à dresser « un état de la situation » a finalement pris des airs de confession municipale.

Le maire n’a pas cherché à masquer la responsabilité de son administration dans toute cette affaire. « Ratés dans la transmission d’information, série de mauvaises décisions, pratiques malheureuses », Claude Corbeil a reconnu les torts de son organisation, ajoutant que la Ville est prête à collaborer avec les autorités pour « revoir ses façons de faire et assumer les conséquences de ses erreurs ».

Quelle sera la punition?

À ses côtés, Christian Blanchette, le coordonnateur régional d’Urgence-Environnement pour l’Estrie-Montérégie, paraissait encore sidéré d’apprendre que son principal partenaire pendant les recherches de la fin de semaine était en fait le suspect numéro un du déversement.

Puisque M. Blanchette s’est fait avare de commentaire à partir de ce moment, c’est plutôt au ministère de l’Environnement que les questionnements se sont transportés à partir de lundi. Des « vérifications » sont en cours pour déterminer si la Ville a enfreint la loi, a commenté le porte-parole du Ministère pour l’Estrie-Montérégie, Daniel Messier, qui ne parle toutefois pas « d’enquête » à ce stade-ci.

On ignore donc si des sanctions seront prises contre la Ville pour cette surverse pratiquée en catimini. Ni le ministère de l’Environnement ni les hautes instances de la Ville n’ont été mis au fait, à en croire le maire. De manière générale, les municipalités se doivent d’aviser le Ministère « dès qu’il y a une modification dans les activités d’une station d’épuration », a précisé Daniel Messier. Plusieurs intervenants, dont la Fondation Rivières, appellent déjà à « une sanction exemplaire ».

La Ville a aussi enclenché sa propre enquête interne pour identifier les manquements constatés dans l’organisation au cours des événements. Il est encore trop tôt pour savoir si une ou des personnes seront blâmées dans cette affaire, mais la faute ne serait pas isolée et reposerait plutôt sur une série d’erreurs, a précisé la directrice des communications à la Ville de Saint-Hyacinthe, Brigitte Massé.

Le pire moment

Chose certaine, c’est bien le moment choisi pour enclencher cette surverse qui a été l’erreur fatale. La Ville procède en effet à plusieurs opérations semblables chaque année, plus précisément à 43 au cours de l’année 2013, la plus récente pour laquelle on peut obtenir ces données. La majorité est liée à des événements climatiques, a précisé Brigitte Massé. Celle du 28 juin avait donc un caractère plus exceptionnel. Mentionnons que seul le nombre de surverses est disponible en vertu des exigences du Ministère, et non les quantités déversées.

Les autorités municipales ont tenu à assurer que la qualité de l’eau potable n’a jamais été affectée, pour la simple raison que l’usine de traitement de l’eau se trouve en amont et la station d’épuration en aval. La fréquence des tests d’eau potable avait tout de même été relevée par précaution.

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