27 octobre 2011 - 00:00
On a eu chaud à Saint-Denis
Par: Le Courrier


Il était environ 10 h lorsque la moitié de la chaussée s’est affaissée du côté de la rivière Richelieu juste en face du 272, Chemin des Patriotes, une jolie maison patrimoniale où vivent un couple et leurs trois enfants. Elle se trouve dans une courbe située entre la rue du Domaine et la Montée du Coteau.

« La mère était assise dans la maison lorsque c’est arrivé. Elle a vu le poteau électrique glisser, puis disparaître sous ses yeux. Elle s’est avancée vers la fenêtre et elle a vu la route s’en aller avec », a raconté le maire de Saint-Denis-sur-Richelieu, Jacques Villemaire, qui a été l’un des premiers à arriver sur les lieux. « La première chose à laquelle j’ai pensé, c’est à la tragédie de Saint-Jude en 2010. On ne s’imagine pas que ces choses-là peuvent arriver chez nous et pourtant, ça aurait pu arriver », a-t-il soupiré.Bien que la maison de la famille Boivin ne se trouve qu’à quelques mètres de la route, l’ordre d’évacuer la résidence qui avait été donné après l’affaissement de terrain a été levé plus tard dans la journée, après réévaluation des risques par un ingénieur du gouvernement. Les Boivin ont donc pu réintégrer leur demeure le jour même. Joint chez lui, le propriétaire, Pierre Boivin, ne semblait pas inquiet. « Ça a l’air stabilisé », a-t-il indiqué au COURRIER.Le maire Villemaire a révélé que des fissures inquiétantes étaient apparues sur la chaussée dans les jours qui ont précédé le glissement. Le chemin venait tout juste d’être asphalté à neuf par le ministère des Transports (MTQ) et pourtant, il commençait déjà à se lézarder. « Ça se voyait à l’oeil qu’il y avait un problème. Au début, c’était de petites fissures, mais à la fin, on aurait pu passer le bras dedans. Ce n’était pas normal et j’ai appelé au Ministère », a indiqué M. Villemaire.

Projet de stabilisation

Le tronçon de route qui s’est affaissé à Saint-Denis est l’un des 26 segments à risque que le ministère des Transports (MTQ) veut rendre sécuritaires le long du Richelieu d’ici 10 ans en commençant par les cas les plus urgents.

Le « Programme de stabilisation des berges de la rivière Richelieu le long des routes 133 et 233 entre Saint-Basile-le-Grand et Saint-Ours » a fait l’objet d’un rapport du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) en juin 2011. Les audiences s’étaient déroulées en février et mars à Beloeil et l’un des participants, Onil Perrier, traitait justement du tronçon 133-6 à Saint-Denis – celui qui s’est affaissé – dans le mémoire qu’il a déposé. Il proposait la construction d’un chemin de contournement des bâtiments de la zone, dont la maison de M. Boivin et une ancienne école de rang à laquelle il s’intéresse, mais sa suggestion n’a pas été retenue.« D’une année à l’autre, nous voyons l’asphalte décrocher. La chaussée penche dans le sens inverse de la courbe et les camions qui roulent à 90 km/h sont déportés vers l’extérieur », expliquait-il dans son mémoire. Les derniers événements ne l’ont donc pas du tout surpris. « Il se produit ce que je prévoyais », a-t-il commenté.M. Perrier, qui a été inspecteur municipal à Saint-Denis de 1979 à 1985, croit que les travaux d’asphaltage pourraient être l’élément déclencheur du glissement. « Ils ont mis un pied d’asphalte supplémentaire pour corriger l’inclinaison du chemin. Ça représente au moins une centaine de tonnes d’asphalte ». Selon lui, il se peut très bien que ce soit ce poids qui a entraîné vers la rivière un talus déjà instable. « On a bien l’impression qu’ils s’entêtent dans leurs solutions », a-t-il conclu.Dans le rapport du BAPE, on apprend que le tronçon 133-6 devait être traité en urgence, mais qu’après révision, le MTQ l’avait plutôt classé parmi les projets à réaliser dans un horizon de trois à dix ans. Or, en raison de ce qui vient d’arriver, les travaux de stabilisation de la berge qui étaient projetés vont commencer tout de suite, a fait savoir le maire Villemaire. Il ne s’attend donc pas à ce que la route 133 soit rouverte avant des semaines.

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