1 juillet 2021 - 07:00
Abandon du projet Lokia
Partie remise
Par: Le Courrier

Si les voies du Seigneur sont impénétrables, on peut en dire autant des rebondissements dans le projet Lokia, nom du promoteur immobilier qui devait construire un complexe pour personnes âgées afin de loger sous un même toit les Sœurs de la Présentation de Marie et les Sœurs de la Charité de Saint-Hyacinthe. Le projet est tombé à l’eau sans que l’on sache trop pourquoi. Et on nage encore en plein mystère une semaine plus tard.

La version officielle tient sur un communiqué d’à peine 10 lignes. Il n’a pas été diffusé à grande échelle et n’est même pas signé. Nous avons dû faire des pieds et des mains pour l’obtenir en insistant auprès du conseiller municipal du secteur, David Bousquet. Pour l’essentiel, le document confirme que « le projet de construction de la résidence pour aînés qui devait voir le jour sur une partie du terrain de la communauté des Sœurs de la Présentation de Marie, sur la rue Larivée, n’aura finalement pas lieu. Dans le contexte que nous vivons présentement, n’ayant pu remplir de façon satisfaisante les conditions inhérentes à ce projet, il a été jugé préférable d’y mettre fin. » Les conditions qui n’ont pu être remplies ne sont pas détaillées, pas plus que les parties n’avaient souhaité chiffrer l’investissement nécessaire à la réalisation du complexe lors de son annonce en mars.

Il devait prendre la forme de deux immeubles, l’un de six étages et l’autre de neuf étages, regroupant 312 unités de logement, dont 106 à l’usage des religieuses autonomes. À cela devaient s’ajouter 62 unités de soins et 144 logements destinés à une clientèle laïque.

Ce que l’on sait avec certitude, c’est qu’il n’y avait pas d’embûches du côté de la Ville de Saint-Hyacinthe. Le projet avait reçu, pour l’essentiel, la bénédiction des autorités municipales.

L’acceptabilité sociale était même acquise, malgré certaines craintes formulées dans le voisinage à propos de l’impact de ce projet d’envergure dans le quartier. Même la coupe annoncée de quelque 200 arbres dans le boisé privé des religieuses n’avait pas soulevé l’ire des plus verts d’entre nous. À part quelques commentaires ici et là, rien de significatif ne semblait vouloir se mettre sur la route du promoteur et des religieuses.

Il faut dire que ce que l’on nous promettait ne sortait pas de nulle part. Le Groupe Lokia avait une bonne expertise dans le domaine et il ne faisait que répéter à Saint-Hyacinthe une recette éprouvée ailleurs. Beaucoup de soin avait été apporté à l’élaboration du projet et à sa présentation, fruit de démarches qui ont duré trois bonnes années entre le promoteur et les communautés religieuses. Le promoteur n’avait rien ménagé : plans d’architecture, maquette, vidéo de présentation, étude de circulation, étude d’impact de l’ombre sur le quartier en fonction de l’heure et des saisons. Il avait mis le paquet. D’où la stupéfaction provoquée par cette conclusion.

Cette surprise de taille n’est pourtant pas la première à mes yeux. En mars, j’avais fait part à la supérieure provinciale des Sœurs de la Présentation de Marie de mon étonnement à l’égard de la décision de la congrégation de quitter leur maison mère. Cet immeuble avait été reconstruit du tout au tout après l’incendie du couvent et du collège Saint-Maurice en avril 1992. Vu sa relative jeunesse, je croyais qu’il aurait pu loger convenablement les religieuses tout le temps nécessaire.

Sr Clémence Moreau m’avait expliqué que des mises aux normes s’imposaient et que sa communauté ne voulait plus être propriétaire ni avoir à composer avec ce fardeau administratif et logistique. Elle était convaincue et convaincante. Alors pourquoi ce qui était vrai en mars ne le serait-il plus en juillet?

La question ouvre la porte à bien des spéculations. Y a-t-il eu mésentente profonde entre les religieuses et le Groupe Lokia? Un désaccord entre les deux communautés impliquées? Un autre promoteur, de l’extérieur ou même local, se serait-il invité dans la danse? Toute l’incertitude liée à la vocation future du couvent de la rue Girouard a-t-elle pu refroidir les religieuses? Tout cela est plus mystérieux encore que les trois secrets de Fátima! Mais tout bien considéré, je suis convaincu que ce n’est que partie remise. Ne soyez donc pas étonné si on vous parle bientôt d’un plan B dans le boisé impliquant un autre promoteur que Lokia.

Les prières de nos religieuses finiront bien par être exaucées.

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