7 février 2013 - 00:00
Soeurs de Saint-Joseph
Que de trésors à préserver!
Par: Le Courrier

Dans un peu plus d'un an, les Soeurs de Saint-Joseph de Saint-Hyacinthe tourneront la page sur un grand pan de leur histoire, un moment difficile qui sera marqué par un grand déménagement.

Que de trésors, que de souvenirs devront-elles abandonner, avenue Raymond, lorsqu’elles entreront dans leur nouvelle demeure de la rue Dessaulles, Les Jardins d’Aurélie, où elles cohabiteront au début avec 14 soeurs adoratrices du Précieux-Sang. C’est d’ailleurs sur la propriété de ces soeurs cloîtrées, à l’arrière de leur monastère de la rue Girouard Ouest, que sera mise en chantier ces jours-ci la maison d’hébergement de 130 chambres qui accueillera ces religieuses à son ouverture, prévue pour le 1er juin 2014.

Ce moment venu, 116 soeurs de Saint-Joseph quitteront la maison-mère pour emménager aux Jardins d’Aurélie, tandis que le groupe de 48 soeurs qui oeuvrent toujours pour la communauté continuera d’occuper la résidence Notre-Dame, cette aile de la maison-mère ayant déjà abrité un pavillon de l’école secondaire Saint-Joseph.

À vendre

Mais pour toutes les Soeurs de Saint-Joseph – il en reste 23 ailleurs au Québec, tandis que 89 autres sont en mission au Brésil (23) et au Lesotho (66)-, c’en sera fini de la grande maison-mère de Saint-Hyactinthe telle qu’elles la connaissaient, avec ses sections construites en 1889, 1897, 1901, 1954 et surtout, sa lumineuse chapelle, une oeuvre architecturale aux lignes pures qui a été réalisée en 1929. « On aime beaucoup notre chapelle; on aimerait bien la conserver », a confié la trésorière générale, soeur Monique Mathieu, durant la tournée des lieux avec les représentants du COURRIER.

Qu’adviendra-t-il de la maison-mère des Soeurs de Saint-Joseph? Nul ne le sait encore. La communauté vient tout juste de confier le dossier à la firme CBRE, une société spécialisée dans la vente de ce type d’immeuble institutionnel. « Nous n’avons signé le contrat qu’en décembre, ce n’est pas encore très développé. C’est à naître », explique la supérieure générale, soeur Denise La Barre.Pour elle aussi bien sûr, cette mise en vente annonce une bien triste séparation. « La chapelle, c’est un point sensible. C’est presque une église. Nous ne pourrons pas avoir ailleurs une aussi belle chapelle. Nous sommes très attachées à notre histoire et ce n’est pas sans peine que nous laissons aller tout cela », soupire-t-elle.Depuis sa fondation à La Providence par Élisabeth Bergeron en 1877, la communauté des Soeurs de Saint-Joseph, vouée à l’éducation, a accumulé quantité de pièces rares illustrant l’histoire de l’enseignement que les soeurs aimeraient bien pouvoir confier à quelqu’un. La dépouille de soeur Bergeron, dont les restes ont été exhumés en 1968, repose aussi à la maison-mère. Voilà autant de réalités qui compliquent la suite des choses.Les soeurs fondent donc tous leurs espoirs dans la réalisation d’un grand projet de musée régional à Saint-Hyacinthe, un musée qui s’intéresserait non seulement à l’histoire des communautés religieuses, mais aussi à toutes les institutions et aux personnages qui ont marqué Saint-Hyacinthe.

Un départ planifié

Durant toute son histoire, la Communauté des Soeurs de Saint-Joseph a accueilli dans ses rangs pas moins de 1 200 soeurs qui ont travailé dans d’innombrables maisons d’enseignement du Québec et d’ailleurs, surtout hors des grands centres. Vers 1977, pas moins de 700 soeurs s’activaient un peu partout, puis le déclin s’est amorcé, faute de relève chez les jeunes filles. « La dernière est entrée en 1984, et a prononcé ses voeux en 1987 », mentionne soeur Pauline Vertefeuille.

Tous les cinq ans, au chapitre, les soeurs abordaient la question du vieillissement et de la baisse des effectifs, tout en se projetant dans l’avenir. La moyenne d’âge des religieuses qui logent à la maison-mère oscille autour de 84 ans. Le 15 janvier, soeur Hélène St-Germain est décédée à l’âge de 103 ans, et ce lundi, c’est sa soeur cadette, soeur Claire, qui s’est éteinte; elle aurait eu 100 ans en avril. Malgré ces départs, la communauté comptera trois autres centenaires au printemps, si Dieu le veut.Conçue pour des soeurs actives et en pleine forme, la maison-mère ne leur convenait plus comme milieu de vie. Pour les soeurs atteintes d’Alzheimer, l’immense bâtiment est devenu un labyrinthe où elles peuvent errer longtemps. « On aurait pu en perdre même dans la maison », a confié l’assistante générale, Claudette Robert.« Le statu quo n’était plus possible et n’était pas souhaitable », explique soeur La Barre, en montrant le volumineux dossier résumant le travail du comité de pilotage qui avait été mis sur pied en 2010 pour trouver une solution. Les Soeurs de Saint-Joseph convoquèrent alors toutes les communautés de la ville pour les mettre au courant du projet : les Soeurs de La Présentation de Marie, les Soeurs grises, les Soeurs de Sainte-Marthe, les Soeurs de la Charité, les Soeurs du Précieux-Sang et les prêtres du Séminaire.Une proposition émanant du secteur privé, celle du Groupe Fotar, est finalement venue pour la construction d’une maison d’hébergement adaptée aux besoins des religieuses; le projet pouvait se réaliser sur le terrain des Soeurs adoratrices du Précieux-Sang, lesquelles souhaitaient s’y associer. « Elles rêvaient de venir finir leurs jours avec les Soeurs de Saint-Joseph », souligne soeur Vertefeuille. Les Soeurs du Précieux-Sang, qui ne sont plus que 45, prévoient abandonner leur monastère en 2018.Il existe un lien particulier entre les deux congrégations du fait que la Vénérable Élisabeth Bergeron a d’abord été postulante chez les Soeurs du Précieux-Sang, une communauté qui a été fondée par Catherine Aurélie Caouette. « C’est ce qui a permis aux soeurs d’entrer dans ce projet-là avec plus d’enthousiasme. C’est un clin d’oeil des fondatrices », sourit soeur La Barre.Quant à la maison des Jardins d’Aurélie, elle n’aura rien d’un palais, assure-t-elle. « Ce ne sont pas des condos de luxe, mais de simples chambres. Le seul luxe peut-être, c’est qu’il y aura une salle de toilette par chambre, ce que nous n’avons pas ici. »Dans 15 ans, la maison Les Jardins d’Aurélie pourra accueillir des membres d’autres communautés et des laïcs. « Des gens qui voudront profiter du même luxe que nous! », a ajouté en riant soeur La Barre.

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