21 novembre 2019 - 16:44
RIAM : juge et partie
Par: Martin Bourassa
Martin Bourassa

Martin Bourassa

La Régie intermunicipale d’Acton et des Maskoutains, la RIAM pour les intimes, ne fait pas parler d’elle souvent. Celle qui voit à assurer la coordination de la collecte des résidus domestiques, des matières recyclables et des matières organiques sur ce grand territoire fait ses petites affaires dans son coin, sans faire trop de vagues. Puisque les contrats de collecte couvrent plusieurs années, et que les activités sont bien rôdées, les affaires y coulent tel un long fleuve tranquille. Sauf qu’il commence à y avoir de la houle en surface et en coulisses.

À l’origine de cette vague de fond, on retrouve la décision de la Ville de Saint-Hyacinthe de mettre fin au contrat qui la lie à la Régie pour le traitement des matières organiques. Ce contrat de 10 ans, signé en décembre 2014, assurait à la Ville de précieuses matières pour alimenter son usine de biométhanisation. C’est pour y traiter en priorité ces résidus que les gouvernements ont accepté de verser des subventions de 53,6 M$. D’où le contrat pourtant négocié de bonne foi entre Saint-Hyacinthe et les 25 municipalités membres de la RIAM, dont Saint-Hyacinthe.

Mais la piètre qualité du contenu des bacs bruns, où les gens déversent n’importe quoi et des matières sans valeur ajoutée comme du gazon, a vite fait déchanter la Ville. Elle a donc décidé de détourner à grands frais toutes les matières organiques vers un site de compostage. Elle paie donc deux fois pour assurer le traitement des bacs bruns. Comme membre principal de la Régie, puis comme fournisseur qui doit payer pour son incapacité à traiter dans son usine les matières organiques.

Cette situation soulevait l’ire de l’ex-conseiller municipal Alain Leclerc. Il aura fallu longtemps au reste du conseil pour se rendre à ses arguments et tenter de briser ce contrat.

C’est là que tout devient trouble. Voici quelques bizarreries : la Ville de Saint-Hyacinthe pouvait-elle décider de mettre fin au contrat dès l’an prochain, quatre ans avant l’échéance, sans une résolution formelle de son conseil? N’était-elle pas tenue de soumettre ce litige potentiel à un comité d’arbitrage, comme stipulé dans son contrat avec la RIAM?

Plus particulier encore, la Ville de Saint-Hyacinthe peut-elle d’un côté décider de rompre ce contrat et de l’autre voter sur ce dossier avec son vote prépondérant à la table de la RIAM? N’est-elle pas en conflit d’intérêts en étant à la fois juge et partie?

Il y a beaucoup d’aspects légaux à éclaircir. J’ose croire que l’apport du directeur général Réjean Pion est pertinent, lui qui est avocat de formation. Mais comme il est aussi un ancien conseiller de la Ville de Saint-Hyacinthe, il doit naviguer à vue et montrer qu’il a les intérêts de toutes les municipalités membres à cœur. Bref, qu’il n’est le pion de personne. On s’entend que le contrat actuel était tout à l’avantage de la RIAM pour encore cinq ans puisque le contrat fera grimper les coûts liés aux seuls bacs bruns d’environ 450 000 $ en 2020.

Après? Il faudra attendre le résultat d’un nouvel appel d’offres.

Mais en permettant à la Ville de Saint-Hyacinthe de le renégocier à la hausse pour un an et de se sortir de ce bourbier quatre ans avant l’échéance, c’est toute une fleur que la RIAM fait à Saint-Hyacinthe.

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