11 octobre 2018 - 00:00
Plan directeur des trottoirs
Sitôt adopté, sitôt contesté
Par: Rémi Léonard
Rachel Pineault, Josée Côté et Caroline Rivard se sont mobilisées pour informer leurs voisins que les trottoirs de leur rue pourraient être remplacés par des bordures de béton, une décision qui serait illogique, selon elles.   Photo Robert Gosselin | Le Courrier ©

Rachel Pineault, Josée Côté et Caroline Rivard se sont mobilisées pour informer leurs voisins que les trottoirs de leur rue pourraient être remplacés par des bordures de béton, une décision qui serait illogique, selon elles. Photo Robert Gosselin | Le Courrier ©

Rachel Pineault, Josée Côté et Caroline Rivard se sont mobilisées pour informer leurs voisins que les trottoirs de leur rue pourraient être remplacés par des bordures de béton, une décision qui serait illogique, selon elles.   Photo Robert Gosselin | Le Courrier ©

Rachel Pineault, Josée Côté et Caroline Rivard se sont mobilisées pour informer leurs voisins que les trottoirs de leur rue pourraient être remplacés par des bordures de béton, une décision qui serait illogique, selon elles. Photo Robert Gosselin | Le Courrier ©

Le premier mètre de trottoir n’a pas encore été arraché que, déjà, un groupe de citoyennes se lève contre l’orientation prise par la Ville de Saint-Hyacinthe quant à l’entretien de ses trottoirs.


Trois résidentes de la rue des Samares s’organisent depuis quelques semaines dans le simple but de sauver les trottoirs de leur quartier. Vieillissants, ceux-ci ne sont pas inclus dans la liste des trottoirs à entretenir, et donc à conserver, établie par le plan directeur des trottoirs, approuvé par les élus le 4 septembre. En vertu de ce nouvel outil de gestion, il pourrait s’agir de l’un des premiers exemples de trottoirs en fin de vie utile qui seraient remplacés par une bordure de béton au lieu d’être refaits.

Une situation inconcevable pour Josée Côté, Caroline Rivard et Rachel Pineault. Ensemble, elles ont recueilli 77 signatures dans leur voisinage immédiat afin d’appuyer leurs arguments. Le 1er octobre, soir d’élections provinciales, elles se sont ainsi présentées à la séance du conseil avec d’autres voisins pour interpeller les décideurs. « En notre qualité de citoyens, nous protestons contre le plan directeur des trottoirs », a annoncé d’emblée Mme Rivard, dénonçant « une décision qui va entièrement à l’encontre des meilleures pratiques en matière de sécurité des piétons ».

S’appuyant sur des données fournies par la Direction de la santé publique, elle a souligné que le risque de blessure mettant en cause des véhicules chez les piétons est « deux fois plus important » en l’absence de trottoir par rapport aux rues avec des trottoirs de chaque côté.

Elle a aussi souligné les particularités des rues des Samares, Nault et Kéroack, qui sont notamment empruntées en heures de pointe par des automobilistes qui tentent de contourner le trafic de la rue Girouard Ouest, et ce, malgré l’interdiction à cet effet. Ces rues « étroites et à sens unique » comportent en plus un dénivelé important à deux endroits, ce qui bloque la vue des automobilistes qui tournent sur ces rues, autre argument de sécurité qui justifie la présence de trottoirs, selon les citoyennes.

La proximité avec la promenade Gérard-Côté, le collège Saint-Maurice et l’école secondaire Casavant recommande aussi un accès piétonnier sécuritaire, a complété Caroline Rivard. Bref, la perspective de marcher dans la rue, entre les rangées de voitures stationnées, lui paraît incongrue, et encore plus pour les enfants, les parents en poussette et les personnes âgées ou à mobilité réduite.

Moins de trottoirs, plus d’équité?

La citoyenne Josée Côté a poursuivi en questionnant l’absence de toute consultation citoyenne sur la question des trottoirs. Elle a elle-même compris que sa rue pourrait être touchée lorsqu’elle a aperçu un arpenteur par sa fenêtre. « Non, il n’y a pas eu de consultation spécifique des citoyens », a dû reconnaître le directeur général Louis Bilodeau. Il a réitéré la position de l’administration municipale, plaidant pour une « vision globale » et évoquant « l’enjeu d’équité ». Depuis le milieu des années 2000, la construction et l’entretien des trottoirs sont à la charge de l’ensemble des contribuables, a-t-il rappelé, alors que la présence de trottoirs est marquée par des disparités entre les quartiers, notamment en raison des regroupements municipaux, a-t-il expliqué.

« Dans le fond, à la Ville de Saint-Hyacinthe, on veut niveler vers le bas, c’est ce que vous êtes en train de nous dire? », a demandé Josée Côté. « Est-ce qu’il faut considérer que c’est niveler vers le bas ou que c’est avoir une approche cohérente? » a répondu par le biais d’une question M. Bilodeau.

Le conseiller de La Providence, Bernard Barré, en a profité pour ajouter son grain de sel au débat, disant être en politique pour s’inspirer des meilleures pratiques, pas pour « tirer tout le monde vers le bas ». « J’ai beaucoup de respect pour le directeur général, deux fois plutôt qu’une, mais je sais aussi que c’est la voix du conseil municipal et qu’il est parfois pogné pour défendre des décisions discutables, très discutables », a-t-il lancé dans un nouveau plaidoyer pour la conservation de ces infrastructures piétonnes. Avec Jeannot Caron, il a été le seul à s’opposer à l’adoption du plan directeur.

Mme Côté a terminé en plaidant pour une « approche collective et humaine, pas une approche économique » dans le dossier. « On a entendu vos préoccupations, on a votre pétition et on va vous revenir », a simplement répondu le maire Claude Corbeil. « La bonne nouvelle, c’est qu’ils ne sont pas encore partis », a-t-il aussi ajouté en parlant des trottoirs.

Le directeur général a également tenu à servir une mise au point. « Je voyais dans une manchette récemment dans le journal local qu’il y a 66 kilomètres de trottoirs qui disparaissaient. La réalité n’est pas celle-là, il n’y a pas 66 kilomètres qui disparaissent l’année prochaine. Il y a des trottoirs qui ne seront pas refaits avant 10, 15 peut-être 20 ans. C’est simplement une orientation qui a été donnée », a-t-il affirmé. L’article en question indique pourtant clairement dès la deuxième phrase que les trottoirs seraient retirés « en fin de vie utile ».

D’autres se prononcent

La conseillère Stéphanie Messier est aussi intervenue pour défendre le plan directeur des trottoirs, même si elle a admis avoir eu au départ « exactement la même réaction » que les citoyennes. « Le plan directeur est un cadre de gestion et, d’ici à ce qu’il soit mis en application, dans 10, 15, 20, ou 30 ans, il va y avoir plein de choses mises en place qui vont peut-être mettre un petit holà », a-t-elle expliqué, plaidant pour de l’ouverture et de la flexibilité sur l’application du document. Elle voulait surtout insister sur l’aspect « évolutif » du plan. « Vous allez trouvez mon parallèle peut-être ridicule, mais si on prend en considération que le plan directeur des trottoirs est une recette de crêpe, bien s’il manque de liquide, on va rajouter du lait », a-t-elle imagé. Bref, « il y a moyen de s’ajuster », a résumé la conseillère du secteur Saint-Sacrement.

David Bousquet, conseiller du quartier Sacré-Cœur, a ajouté sa voix puisque des trottoirs ont justement été retirés sur un seul côté des rues Morison, Papineau et Viger, dans son secteur. « La décision s’est prise avec la collaboration et la consultation de tous les citoyens », a-t-il évoqué, affirmant que, dans la plupart des cas, l’intervention aura permis d’ajouter de la verdure et s’est avérée positive pour les résidents.

Les trois citoyennes souhaiteraient que les Maskoutains puissent au moins pouvoir consulter le plan directeur afin de savoir si leur rue est touchée. Leur but avoué est que leur exemple fasse des petits et que d’autres comités de défense des trottoirs se mettent sur pied à travers les quartiers.

Reconnaissant qu’il n’était pas encore disponible, M. Bilodeau a indiqué que ce sera chose faite. Au moment de mettre sous presse, neuf jours après la séance, le plan directeur des trottoirs n’était toujours pas en ligne.

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