24 septembre 2020 - 14:03
Le populaire restaurant familial fermera ses portes en novembre
Ti-Père accroche son tablier
Par: Martin Bourassa
Photo François Larivière | Le Courrier ©

Photo François Larivière | Le Courrier ©

Le réputé restaurant Ti-Père fermera ses portes le 15 novembre, ce qui marquera la fin d’une longue aventure qui a débuté à Saint-Hyacinthe au milieu des années 1950. La famille Pelletier est aux commandes depuis 1964. Photo François Larivière | Le Courrier ©

Le réputé restaurant Ti-Père fermera ses portes le 15 novembre, ce qui marquera la fin d’une longue aventure qui a débuté à Saint-Hyacinthe au milieu des années 1950. La famille Pelletier est aux commandes depuis 1964. Photo François Larivière | Le Courrier ©

Une institution de la restauration maskoutaine a causé une véritable commotion, samedi, en annonçant sa fermeture prochaine.

Le restaurant Ti-Père mettra ainsi un terme à 56 ans d’opérations en novembre, si la santé publique n’en décide pas autrement d’ici là en imposant de nouvelles contraintes aux restaurateurs. Les amateurs de poulet, de sauce forte et de salade de chou, des produits qui ont forgé la réputation de ce restaurant familial depuis 1964, sont sous le choc.

C’est par l’entremise d’une publication sur sa page Facebook que la direction du restaurant, propriété du Maskoutain René Pelletier, a communiqué ses intentions. « Cher(ère)s client(e)s, c’est avec beaucoup d’émotions que nous vous annonçons notre fermeture prochaine. Nous espérons pouvoir vous servir jusqu’au 15 novembre si les conditions le permettent. 56 ans, c’est beaucoup de clients servis, beaucoup d’employé(e)s qui ont fait partie de notre long parcours […] Merci pour toutes ces années… »

Aucune raison n’a été avancée pour expliquer cette décision, ouvrant toute grande la porte à bien des spéculations dans la communauté.

Nos demandes d’entrevue auprès de la famille Peletier n’ont malheureusement pas eu de suite. Mais dans un message qu’elle nous a fait parvenir, la direction mentionne cependant que la pandémie actuelle n’est pas la raison principale derrière cette décision d’affaires.

« Cette décision difficile n’a pas été prise à la légère, assure-t-on, mais différents facteurs se sont combinés et nous ont incités à accepter une offre qui nous a été faite, qui implique la fermeture du restaurant. »

Cette déclaration laisse entrevoir la vente imminente de l’immeuble et un possible changement de vocation.

Le bâtiment et le terrain, évalués à 2,2 M$ au rôle d’évaluation de la Ville de Saint-Hyacinthe, se trouvent à un carrefour stratégique. Ils sont situés à l’intersection des boulevards Laframboise et Casavant, sans doute le plus achalandé à Saint-Hyacinthe.

Qui plus est, la propriété commerciale qui se trouve tout juste aux côtés du Ti-Père est celle où logeait jusqu’en novembre 2018 le restaurant Poulet frit Kentucky. Ce terrain appartient au Groupe Jean Coutu depuis août 2014.

Dans l’immédiat, les priorités de la direction sont consacrées à accompagner les employés et à servir la fidèle clientèle jusqu’au bout. « Ce fut un plaisir de voir ces clients semaine après semaine, année après année, témoigne la direction. Nous avons eu le privilège de faire partie de moments marquants de leur vie, que ce soit des mariages, des célébrations familiales, etc. »

En octobre 2016, Ti-Père avait déjà mis la clé sous la porte du comptoir et restaurant qu’il opérait sur la rue Dessaulles à Saint-Hyacinthe depuis 52 ans.

Onde de choc

La nouvelle de la fermeture du Ti-Père s’est répandue comme une traînée de poudre sur les réseaux sociaux qu’elle a aussitôt enflammés.

Déjà, samedi soir, LE COURRIER a été le premier média à relayer la nouvelle par l’entremise de sa page Facebook. Cette dernière a littéralement été prise d’assaut par des centaines de Maskoutains surpris par la tournure des événements.

Mercredi matin, notre nouvelle annonçant la fermeture du Ti-Père à la mi-novembre avait rejoint pas moins de 165 000 personnes et généré à elle seule plus de 1150 réactions et plus de 1000 commentaires d’abonnés.

Rencontré par LE COURRIER, l’ex-restaurateur maskoutain Paul-Émile Parenteau ne cachait pas sa surprise face à la fermeture du Ti-Père. « Sur le coup, quand j’ai vu ça, je n’y ai pas cru. J’ai pensé à une blague. Dans ma tête, c’était impossible tant Ti-Père fait partie des meubles et du paysage maskoutain depuis longtemps. »

Il faut dire que la famille Parenteau est étroitement associée à l’histoire du Ti-Père puisque ce sont les parents de Paul-Émile Parenteau qui ont lancé cette cantine à même l’épicerie familiale de la rue Bourdages à Saint-Hyacinthe dans les années 1950. Le « Ti-Père » en question est d’ailleurs le surnom que portait Marcel Parenteau, l’un des frères de Paul-Émile.

Pour la petite histoire, il faut savoir que c’est Lucien Parenteau, un autre frère de Paul-Émile, qui a repris le restaurant de ses parents et qui l’a vendu à René Pelletier au milieu des années 1960, avec une clause empêchant Lucien Parenteau de rouvrir un restaurant de poulet dans les dix années suivant la transaction. « De mémoire, mon frère a vendu le fonds de commerce pour la somme de 25 000 $ », se remémore Paul-Émile Parenteau.

N’étant pas liés par l’entente entre René Pelletier et son frère Lucien, Paul-Émile et un autre de ses frères lanceront la rôtisserie Parenteau au début des années 1970, devenant du même coup un féroce compétiteur du Ti-Père pendant les années qui suivront.

Ironie du sort, la fille de Paul-Émile, Isabelle, ajoutera aussi son grain de sel en 2010, en ouvrant à son tour son propre restaurant, la Rôtisserie Excellence. La rivalité entre Ti-Père, Parenteau et Excellence sera épique, d’autant plus que ces trois restaurants maskoutains se battent sensiblement à armes égales. « À la base, nous avons tous les mêmes recettes de sauces fortes et douces à poulet ou de salade de chou, constate Paul-Émile Parenteau. Ce sont les recettes de ma mère qui sont derrière tout ça. Il y a peut-être eu de petites variantes au fil des ans, mais pas tant que ça, je dirais. C’est pas mal du pareil au même partout. »

Paul-Émile Parenteau a rendu les armes en 2013 en vendant sa rôtisserie de la rue Dessaulles. Celle-ci continue toutefois d’opérer.

image