21 juillet 2016 - 00:00
Vivre en CHSLD
Par: Le Courrier

Si vous aimez vivre en groupe avec des personnes à la bouche béante anesthésiée et passer votre journée assis en fauteuil roulant devant le téléviseur;

si un bain et moins par semaine vous suffit;

si vous préférez être épousseté au quotidien avec un produit 3 dans 1 sans rinçage : décapant, désodorisant et sauve-temps;

si alors que vous étiez continent, avec le temps et assez rapidement, on vous propose la couche;

si vous portez les mêmes vêtements souillés pendant plusieurs jours;

si l’odeur d’urine et de merde omniprésente ne vous opportune point;

si être assis dans un fauteuil dont le coussin à odeur de pipi vous satisfait;

si vous êtes très patient et que même avec une envie urgente, vous pouvez attendre et attendre encore jusqu’à finalement vous soulager dans votre couche;

si vous aimez vous gaver de pilules sans savoir ce que vous avalez;

si vous êtes un couche-tôt et que vous êtes au lit vers 18 h ou 18 h 30;

si vos jambes sont encore fonctionnelles et que l’impotence ne vous contrarie pas;

si la perte complète de votre autonomie vous comble;

si voir de nouveaux visages pour vos soins d’hygiène au quotidien, ne vous gêne pas;

si vous consentez à être victime du stress du personnel soignant qui bouscule et irradie des soins incommodants par manque de personnel;

si vous acceptez de devenir un « produit » comme dans une usine sur une chaîne de montage qui sert à emballer et vous ficeler pour telle heure;

si vous portez une bavette du déjeuner et parfois jusqu’au dîner;

si manger mou, vous fait saliver;

si vous tolérez de perdre votre dignité;

si vous payez un fort prix pour résider dans une minuscule chambre que vous partagez avec un inconnu;

si votre budget vous le permet, en plus de votre pension mensuelle, vous payez une personne pour les services suivants :

– recevoir un bain supplémentaire

– faire laver vos vêtements afin qu’ils vous reviennent en état d’être portés

– vous accompagner pour une marche quotidienne afin de reprendre un peu d’autonomie

– et avoir quelqu’un avec qui parler et échanger.

Si ces qualités de vie vous conviennent, vous êtes un excellent candidat pour vivre en CHSLD!

Vous pensez peut-être que tout cela est exagéré, ce n’est qu’un aperçu des situations que ma mère vit à l’Hôtel-Dieu de Saint-Hyacinthe.

Je reconnais le dévouement de tout le personnel soignant qui carbure à l’essence humaine, mais le contexte dans lequel ils évoluent est contraignant à la fois pour eux et bien sûr pour les résidents.

À voir l’évolution de ces centres d’année en année, l’on ne peut que constater le haut niveau de dégradation.

Est-ce que devenir vieux, est synonyme de perte de dignité et de respect?

Comment pouvons-nous réinventer la roue de la santé?

Chose certaine, cela ne passera pas par ces centres!

Maman je t’aime, quelle tristesse de te voir en ces murs…

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