13 décembre 2012 - 00:00
Largué par Ultramar après 10 ans
Par: Martin Bourassa

L'ouverture d'une toute nouvelle essencerie de la bannière Ultramar dans le secteur Douville à Saint-Hyacinthe ne fait pas que des heureux.

Parlez-en à Daniel Lapierre, opérateur de la station-service Ultramar située à moins d’un kilomètre de la petite nouvelle, sur le boulevard Laurier.

Dans quelques heures à peine, soit vers 22 heures ce jeudi soir, il accrochera ses quatre pompes pour la dernière fois. Il tirera du même coup un trait sur les dix dernières années de sa vie, passées à servir sa fidèle clientèle.Tel en a décidé la pétrolière Ultramar, propriétaire du terrain et locateur du poste d’essence que loue par contrat annuel M. Lapierre depuis une décennie, mais qui est présente dans le paysage depuis au moins 40 ans, selon des habitués.« Je n’ai droit à aucune compensation, à zéro, c’est merci, bonsoir, à la prochaine! Il n’y a aucune place pour les sentiments », confiait-il au COURRIER, lundi après-midi, entre deux clients. Il faut dire que réaliser une entrevue à cette petite essencerie de Saint-Hyacinthe est un exploit en soi, considérant l’achalandage en ce début de semaine.« C’est toujours comme ça, ça roule à planche et la business est très bonne. Mais Ultramar préfère la nouveauté et je n’ai pas un mot à dire. Elle est chez elle ici. »On sentait beaucoup d’amertume dans les propos de M. Lapierre.« C’est assez ordinaire, c’est désolant même. On (Ultramar) préfère investir dans le gros à l’autre bout au lieu d’investir dans ce qui marche bien déjà. J’ai contribué à monter le panier de bonbons pendant 10 ans et là ils ramassent tout sans rien donner en retour. »Le « gros » dont parle Daniel Lapierre, c’est cette station-service ultramoderne récemment inaugurée au Carrefour du Havre, à l’intersection des boulevards Casavant et Laurier à Douville. « J’ai su il y a un bout que ça se parlait (l’arrivée d’une station-service), mais c’est seulement cet été que j’ai été avisé qu’on mettait fin à mon contrat. Ce devait être le 31 août, puis le 31 octobre. Finalement, ce sera cette semaine. Et on ne m’a jamais offert la gestion de la nouvelle station-service. J’ignore si j’aurais accepté la proposition, mais au moins ça aurait été ma décision. J’aurais pu y réfléchir. »Devant la tournure des événements, il dit regretter de s’être investi autant.« Je n’ai pas de regret, sinon d’avoir mis tout mon coeur là-dedans pour rien. »Il profitera des prochains jours pour prendre des vacances bien méritées et réfléchir aux offres déjà reçues. « J’ai trois ou quatre options sur la table, il n’est pas question de retraite pour moi. Mais ce ne sera pas dans le même domaine, c’est certain. Je ne me serai fait avoir qu’une seule fois… », a-t-il conclu avant de retourner à ses pompes.Une poignée d’employés se retrouvera au chômage forcé à la suite de la disparition de l’une des rares essenceries avec service à Saint-Hyacinthe.Elles ne sont plus que quatre, selon nos calculs. Il y a quelques mois à peine, Ultramar a aussi mis fin aux opérations de l’essencerie avec service située à l’autre extrémité du boulevard Laurier, dans le secteur Annexe, vers Sainte-Rosalie.En contrepartie, elle a ouvert une station-service de grande capacité au projet M, près de l’autoroute 20 et de la sortie pour la rue Girouard.Le responsable des relations de presse chez Ultramar n’a pas rappelé.

Des statistiques

Ces ouvertures et fermetures d’essenceries s’inscrivent à l’intérieur d’un mouvement provincial, selon un relevé rendu public à la fin novembre par la Régie de l’énergie du Québec. Selon ce rapport, le nombre de points de vente d’essence a baissé de 42 % (de 5059 à 2924) au Québec entre 1997 et 2010.

Cette rationalisation s’est fait particulièrement ressentir en Montérégie (de 812 à 481) et dans la région de Montréal (de 557 à 304).En ce qui concerne la MRC des Maskoutains, le rapport révèle qu’au 31 décembre 2010 il y avait 35 essenceries en activité sur le territoire. Le volume annuel des ventes s’établissait à 162 millions de litres, soit une moyenne de 4,9 M de litres par essencerie (comparativement à une moyenne de 3 M de litres pour l’ensemble du Québec).On retrouverait ainsi 2,1 essenceries par 5 000 habitants dans la MRC.Des 35 essenceries de la MRC, 23 se trouvaient d’ailleurs à Saint-Hyacinthe, selon les plus récentes données de la Régie de l’énergie.

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