15 mars 2018 - 00:00
Mort d’Athena Gervais
Le deuil après la mission pour Alain Gervais
Par: Olivier Dénommée
Même concernant un sujet aussi émotif que le décès de sa fille Athena, Alain Gervais reste fort. Pour lui, la priorité est que sa mort ne soit pas en vain. Photo Robert Gosselin | Le Courrier ©

Même concernant un sujet aussi émotif que le décès de sa fille Athena, Alain Gervais reste fort. Pour lui, la priorité est que sa mort ne soit pas en vain. Photo Robert Gosselin | Le Courrier ©

Même concernant un sujet aussi émotif que le décès de sa fille Athena, Alain Gervais reste fort. Pour lui, la priorité est que sa mort ne soit pas en vain. Photo Robert Gosselin | Le Courrier ©

Même concernant un sujet aussi émotif que le décès de sa fille Athena, Alain Gervais reste fort. Pour lui, la priorité est que sa mort ne soit pas en vain. Photo Robert Gosselin | Le Courrier ©

Le Québec en entier a été ébranlé il y a deux semaines lorsque le corps d’Athena Gervais, 14 ans, a été retrouvé dans le ruisseau derrière son école secondaire à Laval. Elle avait consommé, quelques heures avant sa disparition le 26 février, deux canettes de marque FCKD UP, une boisson alcoolisée (11,9 %) fortement sucrée, qu’elle a volées avec un groupe d’amis dans un dépanneur. Son père, le Maskoutain Alain Gervais, se bat depuis pour changer la réglementation entourant spécifiquement ce type de boisson.


Depuis deux semaines, M. Gervais est sur toutes les tribunes. Son but : inciter un changement concret pour changer la culture de l’alcool au Québec et enlever le goût aux jeunes de surconsommer. « Je suis dans un tourbillon incroyable et je reste groundé dans ce combat », avait partagé au COURRIER celui qui s’est promis de « finir [s]a mission avant de faire [s]on deuil ».

Son combat – il n’hésite pas à parler d’une croisade – consiste à convaincre les autorités gouvernementales d’interdire la vente de boissons sucrées contenant plus de 6,5 % d’alcool dans les dépanneurs et les épiceries et à obtenir un affichage sur chaque boisson alcoolisée pour rappeler les dangers de la surconsommation. Le marketing devrait aussi être mieux contrôlé pour empêcher les fabricants de viser spécifiquement les jeunes clientèles, dont les mineurs, à l’aide de slogans accrocheurs et de couleurs flamboyantes.

Une pétition, lancée il y a un peu plus d’une semaine par la marraine de la défunte, Cynthia Painchaud, a recueilli des milliers de signatures de gens qui souhaitent voir des changements dans la loi. La pétition demande aussi que l’éventuelle loi porte le nom d’Athena, « pour donner un sens à sa mort », selon le père. Le passage de M. Gervais à Tout le monde en parle dimanche a fait exploser la popularité de la pétition. « En 36 heures, on est passés de 8 000 à plus de 14 000 signatures », a-t-il estimé.

Des appuis partout

« Je vois déjà un impact. Les gens dans la rue me reconnaissent, surtout les mères de famille, et me disent qu’elles ont eu une discussion avec leurs adolescents la fin de semaine dernière », affirme Alain Gervais, fier d’atteindre les gens « jusque dans leur foyer ».

Les appuis de M. Gervais s’étendent aussi aux médias, nombreux à transmettre ses demandes, aux organismes, dont Éduc’alcool, et même à l’industrie, qui a bien intérêt que cette crise prenne fin rapidement. « Geloso [le fabricant de la boisson FCKD UP] a admis avoir perdu des millions en une seule fin de semaine à cause de cette affaire-là. Il doit avoir hâte que cette histoire se règle, et les autres fabricants aussi. » Il a aussi reçu l’appui de la CAQ. « J’ai un vieux téléphone cellulaire, mais aujourd’hui il vaut un milliard avec tous les contacts qu’il y a dedans », avait-il lancé en entrevue.

Depuis mardi, Alain Gervais peut maintenant aussi compter sur l’appui du gouvernement provincial : les ministres Martin Coiteux (Sécurité publique) et Lucie Charlebois (Réadaptation, Protection de la jeunesse, Santé publique et Saines habitudes de vie) ont annoncé leur intention de proposer des amendements au projet de loi 170* afin d’y inclure, notamment, l’interdiction de vendre des boissons alcoolisées sucrées ayant un taux de plus de 7 % d’alcool dans les dépanneurs et les épiceries, laissant le soin à la SAQ d’en faire la vente… si elle le désire. Il est aussi question de donner plus de pouvoirs à la Régie des alcools, des courses et des jeux pour punir les entreprises qui contreviendraient aux nouvelles règles et d’instaurer un programme de prévention dans les écoles pour mieux sensibiliser les jeunes aux dangers de l’alcool.

Cette sortie survient quelques jours après qu’Alain Gervais ait affirmé au COURRIER qu’il sentait que les choses allaient bouger rapidement. « J’ai su m’entourer des bonnes personnes, qui ont pu mettre la pression pour que ça se concrétise, et ça a fait son chemin, a-t-il commenté. Ce n’est pas fini, mais il y a un beau mouvement déjà! » Il garde un œil sur l’évolution du projet de loi, qui devrait être débattu et voté dans les prochains mois, mais aussi sur les prochaines actions de Santé Canada, qui a le pouvoir d’annoncer des changements dans la loi sur l’affichage de tous les produits alcoolisés au pays.

Tout de même, cette sortie du gouvernement québécois a donné un regain d’énergie à Alain Gervais, qui s’est rendu à Saint-Félicien cette fin de semaine pour les funérailles de « son bébé », un moment « difficile, mais nécessaire ».

*Projet de loi n°170 : Loi modernisant le régime juridique applicable aux permis d’alcool et modifiant diverses dispositions législatives en matière de boissons alcooliques

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