24 octobre 2019 - 13:59
Musique électronique expérimentale
Les paysages sonores d’Automatisme
Par: Maxime Prévost Durand
William Jourdain, bien connu des clients de Fréquences Le Disquaire, mène depuis 2011 son projet de musique électronique expérimentale nommé Automatisme. Les intéressés peuvent assiter à sa performance au Zaricot ce dimanche. Photo Martine L.

William Jourdain, bien connu des clients de Fréquences Le Disquaire, mène depuis 2011 son projet de musique électronique expérimentale nommé Automatisme. Les intéressés peuvent assiter à sa performance au Zaricot ce dimanche. Photo Martine L.

Habité par un désir de repousser les limites des nouvelles technologies, William Jourdain a créé il y a quelques années le projet de musique électronique expérimentale Automatisme. Ses compositions, qu’il présente comme des « paysages sonores », lui ont permis de s’établir au sein de cette scène underground et même de traverser les frontières.

Une résidence de trois soirs à Stockholm, en Suède, attend d’ailleurs le Maskoutain le mois prochain, au cours d’une première tournée européenne qui l’amènera notamment dans des clubs de musique expérimentale à Paris, en France, et à Munich, en Allemagne. Il profitera de son passage aux studios EMS Stockholm pour enregistrer un prochain album, alors qu’il aura l’occasion d’utiliser un synthétiseur modulaire rare des années 1970 qu’il est impatient de pouvoir manipuler.

« Ce studio a une réputation internationale et plusieurs de mes artistes favoris l’ont utilisé. C’est un honneur pour moi d’avoir la chance d’y aller et j’en suis reconnaissant », se réjouit le sympathique William, qui partage son temps entre son projet musical et son emploi chez Fréquences Le Disquaire, au centre-ville de Saint-Hyacinthe.

Cette tournée outre-mer surviendra peu de temps après la sortie de son plus récent album, Rate, qui paraît aujourd’hui même sur l’étiquette Dream Disk Lab, en version numérique et en cassette. En continuité avec le travail précédent d’Automatisme, cet opus est décrit comme « une expérimentation de la temporalité du rythme ».

Avant de mettre le cap de l’autre côté de l’Atlantique, un spectacle de lancement est prévu ce soir à Montréal, puis un autre sera tenu au Zaricot dimanche au cours d’une soirée mettant aussi en vedette Sarah Pagé et Joni Void.

Sur scène, les performances d’Automatisme prennent la forme d’œuvres audiovisuelles immersives « sous forme de cinéma pour l’oreille et de paysages visuels concrets et abstraits ».

Dans le créneau qu’il exploite, une scène intéressante est présente au Québec, estime-t-il. « La culture club en musiques électroniques expérimentales et technos est davantage développée [en Europe] qu’ici, reconnaît le compositeur. Ceci dit, les musiques électroniques ambiantes et noises sont très établies au Québec. Il y a des tonnes de labels et d’artistes underground qui sont présents et il y a de nombreux événements noises presque tous les soirs, plus que dans les autres genres de musique électronique. »

Manipuler la technologie

Pour créer, William Jourdain utilise notamment des synthétiseurs modulaires, en plus des différents logiciels à sa portée, comme Ableton Live et Logic Pro.

« Cela dit, l’évolution de mes compositions change constamment, car les outils de composition par ordinateur évoluent rapidement », fait-il remarquer.

Comment décrire la musique d’Automatisme? « Je fais un mix d’ambiant, de clicks & cuts, de dub techno, de field recordings et de glitch », énumère-t-il.

Et ça se traduit comment? « Je définis cette fusion que je fais comme étant des architectures sonores et des paysages. Autrement dit, ce sont des paysages sonores. »

Le pourquoi avant le résultat

Avant-gardiste assumé, William Jourdain avait choisi de nommer son projet Automatisme en référence aux « Automatistes », un mouvement artistique moderniste qui a débuté au Québec dans les années 1940 et qui a mené au manifeste Refus global rédigé par l’Hilairemontais Paul-Émile Borduas.

Les fondements de ce mouvement ont constamment été source d’inspiration pour Automatisme depuis sa création en 2011. L’intention derrière le projet musical est d’ailleurs bien plus que la musique elle-même, précise le Maskoutain.

« Actuellement, nous assistons à la globalisation et à la saturation du temps et de l’espace. Mon intentionnalité est de sensibiliser les auditeurs à prendre le temps d’écouter au sens large, pas seulement concernant la musique, mais qu’ils prennent le temps d’écouter leur environnement, mentionne-t-il. De plus, les gens doivent lire les déclarations artistiques de l’Automatisme avant d’écouter la musique. S’ils ne le font pas, ils vont manquer une grande partie de ce qu’il faut entendre. Je trouve essentiel de se concentrer sur le processus et sur la technique, et ensuite sur le résultat. Pour moi, la façon dont nous créons est une source infinie de potentiel, plus que le pourquoi nous créons. »

Consacrant près de 30 heures par semaine à Automatisme, William Jourdain fait constamment paraître du nouveau matériel, entre deux et cinq publications par année, que ce soit en solo ou en collaboration avec d’autres artistes sonores, sous forme d’album, de EP, de remix ou de performances live. À peine Rate sera-t-il paru qu’un autre album, Alter, est prévu pour le début 2020 avec l’étiquette allemande Mille Plateaux.

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