27 octobre 2011 - 00:00
Madame culture et patrimoine
Par: Martin Bourassa


Francine Girard a été de tous les combats depuis 30 ans

Tant et si bien que depuis une trentaine d’années aucun dossier culturel ou patrimonial n’a été mis en place à Saint-Hyacinthe sans son apport inestimable. Elle a d’ailleurs participé activement à l’élaboration de la politique culturelle municipale et à la création du Conseil de la culture en 1994, organisme qu’elle préside depuis 1999.

Cofondatrice du centre d’exposition Expression de Saint-Hyacinthe, voué à la diffusion des arts contemporains, Francine Giard a entre autres été associée à la mise en oeuvre de la Commission régionale du patrimoine au printemps 2006 et à la rédaction de la politique du patrimoine de la MRC des Maskoutains.Tout récemment encore, elle a contribué au déploiement d’un grand circuit patrimonial à travers les rues de la Ville de Saint-Hyacinthe et siégé au jury de sélection d’une oeuvre d’art pour le nouveau centre aquatique de Saint-Hyacinthe. « Je suis une jouisseuse, dit-elle tout de go. Je suis en recherche perpétuelle de plaisir et de connaissances. »Ceux qui ont eu la chance de collaborer avec elle ou encore de profiter de son expertise ne tarissent pas d’éloges à son égard. Au Conseil de la culture, ses collègues vantent ses talents de communicatrice et de pédagogue hors pair, son jugement sûr.Chez Expression, le directeur Marcel Blouin la qualifie « de bénévole d’exception à l’enthousiasme contagieux, de richesse inestimable pour la communauté. »Pour toutes ces raisons et pour l’ensemble de son oeuvre, Le Courrier de Saint-Hyacinthe et la Chambre de commerce et de l’Industrie Les Maskoutains sont heureux de décerner le titre de personnalité du mois d’octobre à Mme Francine Girard.

Du Collège au Musée, en passant par le Cégep

Réaliser un portrait de Francine Girard est un exercice plus ardu qu’il n’y paraît. Outre la grande difficulté de faire le tri entre tous ses accomplissements et ses implications au fil des ans, il faut surtout l’amener à parler d’elle et lui soutirer des confidences. Elle pourrait parler d’art, de Picasso ou du peintre valois Serge Lemoyne pendant des heures, mais c’est au compte-gouttes qu’elle se raconte.

Native de Saint-Hyacinthe, Francine Girard est l’aînée d’une famille de deux enfants. Son père tenait une manufacture d’articles de cuir et sa mère a fait le commerce pendant quelques années de vêtements de maternité. Mme Girard a grandi dans le quartier Christ-Roi, celui de l’illustre T.D. Bouchard. Elle raconte que son grand-père Eugène Girard a d’ailleurs fait de la politique municipale avec celui que l’on a surnommé The Devil from Saint-Hyacinthe, dans une récente biographie.C’est lors de ses études au Collège Saint-Maurice, au contact des Soeurs de la Présentation de Marie, que Mme Girard s’ouvrira à la beauté du monde et aux arts.« J’ai reçu une formation exceptionnelle donnée par des femmes libres d’esprit et de pensée, des femmes très ouvertes au niveau des idées. C’était avant le féminisme, mais je dirais qu’elles étaient féministes à leur façon. »Après l’obtention d’une Licence en histoire de l’art, Francine Girard se dirige vers l’enseignement et débarque au Cégep de Saint-Hyacinthe en 1969. Elle y passera finalement 35 ans de sa vie, à y enseigner l’histoire de l’art et la photographie, un art plus qu’une technique mentionne celle qui a aussi enseigné la prise de parole en public pendant 10 ans à la Faculté de l’Éducation permanente de l’Université de Montréal et trouvé le temps de publier un roman jeunesse chez Boréal.« Mes années d’enseignement au Cégep ont été un réel bonheur. Tout était à faire et à bâtir sur le plan pédagogique et on l’a fait sur le tas. Nous étions tous de la même génération à faire des essais et des erreurs, à partager nos connaissances pour bâtir le Québec en quelque sorte », raconte Mme Girard, qui a pris sa retraite de l’enseignement en 2004. Elle continue cependant d’éduquer, dit-elle, de sensibiliser.Sauf que son auditoire a changé. Elle se concentre désormais sur le grand public et les administrations publiques où il y a beaucoup à faire.« Que ce soit au Québec ou plus près de nous à Saint-Hyacinthe, il n’y a pas de volonté politique de prioriser la culture. La culture, c’est mou, ça passe après l’asphalte sur les routes et les malades dans les hôpitaux. C’est toujours le premier secteur à écoper quand il faut couper quelque part. C’est pour ça que j’en ai fait mon cheval de bataille. »Et des batailles, elle en a mené. Gagnées quelques-unes et perdues un certain nombre.Mais elle n’a pas l’intention de baisser les bras, encore moins de se taire. Il y a deux ans, elle a quitté avec fracas la Commission du patrimoine, insatisfaite de son orientation générale. Sa capacité d’indignation est aussi demeurée intacte.Quand on lui parle de la destruction de l’arche de l’Expo et de la Maison Casimir-Dessaulles ou du peu d’intérêt politique envers le musée régional dont elle rêve depuis des années, son verdict tombe comme une tonne de briques.« Ce sont des pertes énormes, on fait drôlement dur. Mais je vais continuer de militer pour le musée entre autres. Je ne lâcherai pas. Nous avons une richesse patrimoniale à promouvoir et à partager. L’histoire de notre région, c’est en quelque sorte l’histoire du Québec. Cela mérite d’être raconté, protégé et mis en valeur. »

Une mère et grand-maman comblée

Celle qui a maintenant le luxe de choisir ses projets et ses batailles prend aussi du temps pour elle. À 67 ans, elle court régulièrement son 5 km et voyage à l’occasion. Elle se dit particulièrement comblée par la vie, qui lui a donné trois beaux enfants : Sébastien, 36 ans, historien; Sophie, 35 ans, médecin de famille; et Stéphanie, 33, fonctionnaire au gouvernement fédéral à Ottawa.Mme Girard a aussi trois merveilleux petits-enfants. Elle s’apprête d’ailleurs à emménager dans une maison bigénérationnelle et verte en construction, avec la petite famille de sa fille Sophie. « C’est certainement l’un des beaux cadeaux que la vie aurait pu me faire, vraiment je suis une femme comblée. »Mais elle le serait encore plus si le Musée régional voyait le jour et si jamais la Ville de Saint-Hyacinthe décidait de bannir les voitures autour du Marché public et de citer à des fins historiques tous les édifices et monuments qui le méritent!

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