26 janvier 2017 - 00:00
Itinérance à Saint-Hyacinthe
Portrait d’une réalité méconnue
Par: Olivier Dénommée
Alain D’Amours milite pour sensibiliser la population à la réalité de l’itinérance à Saint-Hyacinthe.  Photo Robert Gosselin | Le Courrier ©

Alain D’Amours milite pour sensibiliser la population à la réalité de l’itinérance à Saint-Hyacinthe. Photo Robert Gosselin | Le Courrier ©

Alain D’Amours milite pour sensibiliser la population à la réalité de l’itinérance à Saint-Hyacinthe.  Photo Robert Gosselin | Le Courrier ©

Alain D’Amours milite pour sensibiliser la population à la réalité de l’itinérance à Saint-Hyacinthe. Photo Robert Gosselin | Le Courrier ©

Certains préjugés ont la couenne dure : celui de l’itinérance en est un particulièrement tenace. On a tendance à s’imaginer une personne sale, intoxiquée et potentiellement dangereuse qui hante les bancs de parc dans les grands centres urbains. Or, le portrait est beaucoup plus nuancé, tient à mettre au clair Alain D’Amours, directeur de Contact Richelieu-Yamaska, qui gère La Maisonnée à Saint-Hyacinthe.


« À Saint-Hyacinthe, il y a de l’itinérance. C’est très dur pour la population en général de le voir, parce qu’il y a un phénomène de “pas dans ma cour”, mais il reste que ça existe », explique Alain D’Amours qui veut déstigmatiser cette réalité, encore difficile à chiffrer. 

En 2012, le Centre de bénévolat de Saint-Hyacinthe estimait à 77 le nombre de personnes vivant dans l’itinérance à Saint-Hyacinthe, mais M. D’Amours remet en doute toute tentative de recensement fiable. « Cela peut donner un aperçu, mais concrètement, c’est très difficile à chiffrer, comme un itinérant se cache par définition. Ceux qui vont s’identifier comme tel sont souvent ceux qui vont en refuge ou qui veulent s’en sortir. C’est difficile même pour les travailleurs de rue de bien chiffrer cette réalité. » Il estime tout de même que la clientèle de son organisme voit un certain roulement de 20 à 30 personnes itinérantes qui profitent régulièrement du service offert en plein centre-ville de Saint-Hyacinthe, tout en sachant que tout le monde ne cherche pas nécessairement refuge.

Portrait-type

L’itinérance maskoutaine n’a évidemment pas un seul visage, mais certaines tendances peuvent être dessinées. Les fichiers de Contact Richelieu-Yamaska indiquent qu’environ quatre hommes pour une femme faisaient appel aux service de La Maisonnée. Quant aux tranches d’âge, si la majorité des itinérants sont âgés de plus de 40 ans, plusieurs jeunes de 18 à 25 ans sont aussi dans la rue : dans la dernière année, un itinérant sur quatre ayant été hébergé à La Maisonnée avait moins de 26 ans.

Différentes itinérances

Selon le Larousse, le mot « itinérant » veut dire « qui n’est pas sédentaire, qui nécessite des déplacements ». Dans cette optique, il serait réducteur de considérer comme itinérants seulement ceux qui vivent sur des bancs de parc. Plusieurs s’adonnent au couching, en n’ayant aucun domicile fixe puisqu’ils se déplaceront entre ceux de membres de la famille ou d’amis qui veulent bien les héberger. « Cela reste une forme d’itinérance, mais moins dure », précise Alain D’Amours, parlant également de certains itinérants qui s’adonnent à la prostitution pour avoir un toit chaque nuit, une réalité que connaissent certaines femmes à Saint-Hyacinthe, selon des témoignages reçus.

Les raisons qui mènent quelqu’un à l’itinérance peuvent aussi grandement différer. « Il y a de l’itinérance situationnelle, dans le cas d’une personne qui se fait mettre dans la rue et qui a des problèmes d’argent par exemple. Celle-là se règle assez vite parce que des organismes vont aider la personne qui ne veut pas rester dans cette situation. Mais pour d’autres, c’est un mode de vie, et c’est le genre d’itinérants qu’on voit davantage à Saint-Hyacinthe », note le directeur de Contact, qui remarque que les personnes en crise qui font appel à son service entrent généralement dans la première catégorie, puisqu’elles sont lourdement affectées par leur situation. Par contre, la clientèle de La Maisonnée est surtout composée d’itinérants de la seconde catégorie.

« Chez eux »

À ceux qui pensent que la solution pour enrayer l’itinérance serait d’envoyer les personnes qui en vivent à Montréal ou à Longueuil, M. D’Amours répond que même si ces personnes n’ont pas de domicile, elles sont chez elles ici à Saint-Hyacinthe. « Les enlever d’ici, c’est leur arracher les racines. Ici, ils connaissent le réseau et ça leur permet d’être plus stables dans leur instabilité », insiste-t-il. 

Alain D’Amours conclut en rappelant que quoiqu’on en pense, l’itinérance est un phénomène qui est là pour rester à Saint-Hyacinthe. Alors, pourquoi ne pas tenter immédiatement de les aider avant que l’état des personnes itinérantes ne s’agrave?, demande le directeur de l’organisme communautaire. 

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